« Que les députés jettent à la poubelle cette décision », les propos de Jacques Ayadji devant la Cour Constitutionnelle

La dernière décision de la  Cour Constitutionnelle relative à la désignation des membres de l’Assemblée Nationale a suscité dans l’opinion publique des vagues d’interventions. C’est dans ce cadre que le Directeur des infrastructures, Jacques Ayadji a tenu certains propos, qui selon le requérant est une violation de la constitution.

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Nom : ALIDOU

Prénom : Adamou

Résidant à Akpakpa-Tanto 06 BP 2271 Cotonou

Cotonou, le 05 Janvier 2018

A Monsieur le Président de la Cour Constitutionnelle Cotonou

Objet: Recours en inconstitutionnalité contre les propos tenus par le Directeur Général des Infrastructures, Monsieur Jacques AYADJI, sur radio Tokpa le 20 décembre 2017.

Monsieur le Président,

Conformément aux dispositions de la loi N°90-32 du 11 décembre 1990 portant Constitution de la République du Bénin, en son article 3, alinéa 3, qui dispose : «…tout citoyen a le droit de se pourvoir devant la Cour Constitutionnelle contre les lois, textes et actes présumés inconstitutionnels», j’ai l’honneur de venir très respectueusement formuler un recours en inconstitutionnalité contre les propos tenus par le Directeur Général des Infrastructures, Monsieur Jacques AYADJI, sur radio Tokpa, le 20 décembre 2017. En faisant fi des exigences de réserve et de mesure découlant de ses fonctions républicaines et en foulant aux pieds avec une légèreté rarement égalée les idéaux qui ont présidé à la tenue en février 1990 de l’historique Conférence des Forces Vives de la Nation devenue depuis lors le point de repère de notre démocratie, Monsieur Jacques AYADJI s’est rendu coupable d’un mépris condamnable à l’égard de l’obligation faite à tout citoyen de respecter les décisions de la Cour Constitutionnelle le jeudi 21 décembre 2017 à 04h25. Largement relayé aussi sur les réseaux sociaux, cet appel de Monsieur Jacques AYADJI a été entendu par les députés du Bloc de la Majorité Parlementaire (BMP), qui ont effectivement «jeté à la poubelle» la Décision DCC 17-262 du 12 décembre 2017. Le respect de la Constitution et de l’ordre constitutionnel est un devoir sacré pour tout citoyen béninois, civil ou militaire. L’article 34 de la Constitution du 11 décembre 1990 en dit long : «Tout citoyen béninois, civil ou militaire, a le devoir sacré de respecter, en toutes circonstances, la Constitution et l’ordre constitutionnel établi ainsi que les lois et règlements de la République». L’article 35 de la même Constitution est on ne peut plus clair : «Les citoyens chargés d’une fonction publique ou élus à une fonction politique ont le devoir de l’accomplir avec conscience, compétence, probité, dévouement et loyauté dans l’intérêt et le respect du bien commun». L’article 114 de la Constitution du 11 décembre 1990 stipule que : «La Cour Constitutionnelle est la plus haute juridiction de l’État en matière constitutionnelle. Elle est juge de la constitutionnalité de la loi et elle garantit les droits fondamentaux de la personne humaine et les libertés publiques. Elle est l’organe régulateur du fonctionnement des institutions et de l’activité des pouvoirs publics». L’article 124 précise que : «Les décisions de la Cour Constitutionnelle ne sont susceptibles d’aucun recours. Elles s’imposent aux pouvoirs publics et à toutes les autorités civiles, militaires et juridictionnelles». L’article 34 de la loi organique de la Cour Constitutionnelle dispose que : « Les décisions de la Cour Constitutionnelle doivent être exécutées avec la diligence nécessaire ». Quant à l’article 43 du règlement intérieur de la Cour Constitutionnelle, il précise que : « L’autorité concernée est appelée à se conformer à la situation juridique résultant de cette décision ». En sa qualité de Directeur Général des Infrastructures du Bénin, exerçant une partie des prérogatives du Ministre des infrastructures et des transports, nommé par le Président de la République, garant du respect de la Constitution et des décisions de la Cour Constitutionnelle, Monsieur Jacques AYADJI ne saurait tenir ces propos. Qu’une autorité de son rang en exercice dise sur une radio à grande écoute que : «…il faut noter que cette Cour est une Cour politicienne. Je souhaite que les députés jettent à la poubelle cette décision de la Cour», est un appel inacceptable de nature à affaiblir, voire humilier la Cour Constitutionnelle et à créer des troubles dans notre pays. Ces propos attentatoires à la démocratie, à l’Etat de droit, à la paix et à la cohésion nationale de Monsieur Jacques AYADJI constituent un précédent extrêmement grave. C’est une rébellion contre la Cour Constitutionnelle, un appel à la déstabilisation de la plus haute juridiction de notre pays en matière constitutionnelle. Ils s’analysent comme une invitation à bafouer constamment les décisions de la Cour Constitutionnelle et à la mépriser. Il en résulte clairement que les propos de Monsieur Jacques AYADJI sont très graves et doivent être considérés comme contraires à la Constitution du 11 décembre 1990. Conclusion Le contenu de la parole peut être de nature à enfreindre la loi y compris la loi constitutionnelle. Tout citoyen béninois jouit de la liberté de pensée, d’opinion et d’expression reconnue par la Constitution. Cependant, cette liberté d’opinion consacrée par la Constitution n’exonère pas le citoyen du respect de la Constitution. Cette exigence de respect de la Constitution et des décisions de la Cour Constitutionnelle est encore plus grande s’agissant d’un cadre du rang de Monsieur Jacques AYADJI dont l’impact de l’opinion sur la conscience collective est plus fort que celui d’un citoyen ordinaire. Sans être partisan d’une quelconque restriction de la liberté d’opinion à nos compatriotes, je vous prie d’asseoir durablement dans la conscience collective l’intangibilité à des fins partisanes des principes de la Constitution, pierre angulaire de notre modèle démocratique, en condamnant fermement les propos incriminés pour violation de l’esprit et de la lettre de la Constitution du 11 décembre 1990 en ses articles 34, 35 et 124. Telle est, Monsieur le Président, la substance du présent recours en inconstitutionnalité, que j’ai l’honneur de soumettre à votre haute appréciation.

ALIDOU  Adamou

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