Mexique : trois italiens disparus vendus 43 euros par quatre policiers

La police mexicaine est mêlée à une bien sombre affaire. Un Italien accuse en effet les autorités d’avoir vendu trois de ses proches, disparus fin janvier, à des membres du crime organisé. Leur valeur ? 43 euros au total.

« Les policiers mexicains ont vendu les membres de ma famille 43 euros de m…, c’est une honte inouïe », a-t-il commenté sur une radio italienne. Et de poursuivre : « Ce sont eux les criminels, pas mon frère, mon père et mon cousin ».

Quatre policiers mexicains ont été arrêtés pour avoir été à l’origine de la disparition le 31 janvier des trois Italiens dans l’État de Jalisco, dans l’ouest du Mexique, a annoncé samedi 24 février le parquet local. Ces agents des forces de l’ordre, dont une femme, ont « avoué avoir livré (les Italiens) à des membres du crime organisé de Tecalitlan », une ville de 16.500 habitants située à environ 600 kilomètres à l’ouest de Mexico, a déclaré au cours d’une conférence de presse le procureur de cet État, Raul Sánchez.

« Disparition forcée »

Les quatre policiers, qui étaient tous en poste à Tecalitlan, sont accusés de « disparition forcée de personnes ». « Il y a d’autres policiers impliqués » ainsi que « d’autres citoyens », a déclaré lundi 26 février le secrétaire du gouvernement de Jalisco, Roberto López, lors d’une conférence de presse.

Selon Francesco Russo, les trois Italiens se trouvaient au Mexique pour y vendre des générateurs électriques et ne sont aucunement impliqués dans le crime organisé. Il a en outre démenti une rumeur selon laquelle son père, âgé de 60 ans, utilisait des faux documents au moment de son séjour au Mexique. Son frère est âgé de 25 ans et son cousin de 29 ans.

« Il faut que l’Italie se bouge, qu’on nous dise où ils sont. Nous espérons qu’ils sont encore en vie », a pour sa part commenté Gino Bergamè, le porte-parole de la famille.Les trois Italiens avaient donné pour la dernière fois de leurs nouvelles au moment de leur arrestation par la police dans une station-service mexicaine.

Le registre national des personnes disparues au Mexique indique qu’en 2017 quelque 2.917 personnes sont portées disparues dans l’état de Jalisco. Dans tout le Mexique, 33.153 personnes sont portées disparues, dont 197 étrangers.

Les disparitions forcées, véritable fléau pour le pays

D’après les chiffres officiels du gouvernement mexicain, plus de 32 000 personnes ont disparu en dix ans. Le pays a même enregistré une augmentation importante en 2016 avec plus de 3 800 disparus, soit dix par jour. Depuis le début de cette année, la tendance est même à la hausse.

Mais ce qui est encore plus inquiétant, c’est que ces chiffres ne reflètent pas la réalité. En effet, on ne peut pas établir avec exactitude le nombre de disparus. Pour la simple et bonne raison que seuls deux cas sur dix seraient dénoncés par les familles de disparus, car elles redoutent l’absence de garanties de sécurité et de protection de la part des autorités qui sont trop souvent de mèche avec le crime organisé.

Les cartels principaux responsables

Ce sont souvent les narcotrafiquants qui enlèvent, assassinent et font disparaître leurs ennemis, souvent d’autres cartels. Mais ce n’est pas tout. Les migrants centraméricains sont fréquemment la proie des trafiquants de drogue qui les séquestrent pour les racketter ou les obliger à travailler pour eux. Ils les exécutent et les font disparaître en cas de refus.

Il y a aussi un phénomène croissant auquel on assiste depuis quelques années : celui de la disparition de jeunes femmes, ou même de très jeunes filles, qui sont enlevées. Elles sont probablement victimes de la traite des personnes ou de réseaux pédophiles. Leurs traces sont totalement perdues, sans savoir si elles sont mortes ou vivantes.

L’Etat aussi impliqué

L’implication d’agents de l’Etat (fonctionnaires, policiers ou membre de l’armée) dans ces disparitions a elle aussi été prouvée. Ils peuvent en être les auteurs, ou aider ou protéger les membres du crime organisé qui parviennent à infiltrer les institutions publiques facilement corruptibles.

Dans l’Etat de Nuevo León, au nord-est du pays, qui compte le plus grand nombre de disparus, 47 % des disparitions ont ainsi été réalisées par des agents de l’Etat, selon une étude récente. Ces disparitions forcées sont donc, pour la plupart, restées impunies.

Autre exemple emblématique de disparition forcée au Mexique : celle des 43 étudiants d’Ayotzinapa en septembre 2014. Ils ont été enlevés par des policiers municipaux et remis à des narcotrafiquants qui les ont fait disparaître. En trois ans, personne n’a retrouvé la trace de ces jeunes.

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