Polémique autour du salaire des ministres: saisie, voici la décision rendue par la cour

Suite au recours introduit au secrétariat de la cour constitutionnelle le 10 Juin 2017 par le sieur Paul Mapoga contre le gouvernement du président Patrice Talon qui , selon le requérant aurait violé l’article 26 de la constitution de 1990 et l’article 10 de la loi organique de la haute juridiction, la cour constitutionnelle dans une décision DCC 18 – 045  du 20 Février 2018 a déclaré « qu’il n’y a pas lieu à statuer en l’Etat ».

Dans sa requête, le sieur Paul Mapoga reprochait au chef de l’Etat de payer gracieusement ses collaborateurs qui sont passés pour les uns d’un salaire de 1.800.000 Fcfa à 8.000.000 Fcfa et pour les autres de 1.800.000 Fcfa à 16.000.000 Fcfa.

A en croire l’auteur de la requête, cette rémunération viole l’article 26 de la constitution et surtout l’article de la loi organique sur l cour constitutionnelle qui dispose que : « les membres de la Cour constitutionnelle reçoivent un traitement  égal au moins à celui alloué aux membres du Gouvernement ». Appréciant la supposée augmentation des salaires des ministres, le requérant estime qu’il y a une sorte de discrimination dont sont victimes les membres de la cour constitutionnelles eu égard à l’article 3 de la loi n° 2001-28 du 11 décembre 2001 et à la loi n° 2001-29 du 11 décembre 2001 en ses articles 8, 9, 11 et 12 qui alignent les avantages alloués aux membres de la Cour constitutionnelle et de la Haute Autorité de l’Audio-visuel et de la Communication (HAAC) sur ceux des membres du Gouvernement.

Mais dans l’analyse du recours, la haute juridiction dans son appréciation a jugé qu’il n’y a pas lieu à statuer en l’Etat puisque le requérant n’a pas mis à la disposition de la cour des éléments d’appréciation de sa requête. Lire ci-dessous la décision DCC 18 – 045 du 20 Février 2018.

DECISION DCC 18 – 045 DU 20 FÉVRIER 2018:

 

La Cour constitutionnelle,
Saisie d’une requête du 10 juin 2017 enregistrée à son secrétariat le 13 juin 2017 sous le numéro 1029/162/REC, par laquelle Monsieur Paul MAPOGA forme devant la haute Juridiction un « recours contre le Gouvernement du Président TALON pour violation de l’article 26 de la Constitution et de l’article 10 de la loi organique sur la Cour constitutionnelle » ;
VU la Constitution du 11 décembre 1990 ;
VU la loi n° 91-009 du 04 mars 1991 portant loi organique sur la Cour constitutionnelle modifiée par la loi du 31 mai 2001 ;
VU le règlement intérieur de la Cour constitutionnelle ;
Ensemble les pièces du dossier ;
Ouï Monsieur Akibou IBRAHIM G. en son rapport ;
Après en avoir délibéré,

CONTENU DU RECOURS
Considérant que le requérant expose : « Le Gouvernement du Président TALON vient multiplier de manière inquiétante le salaire des préfets et ministres. Le ministre en charge des Affaires étrangères a vu son salaire passer de 1.800.000 francs CFA à 16.000.000 francs CFA alors que les autres ministres ont vu leur salaire passer de 1.800.000f à 8.000.000 francs CFA.
Aux termes de l’article 26 de la Constitution : «L’Etat assure à tous l’égalité devant la loi sans distinction d’origine, de race, de sexe, de religion, d’opinion politique ou de position sociale». De jurisprudence constante de la Cour constitutionnelle, «La notion d’égalité s’analyse comme un principe général selon lequel des personnes relevant de la même catégorie doivent être soumises au même traitement sans discrimination». En fixant le salaire du ministre des Affaires étrangères à 16.000.000 francs CFA et celui des autres ministres à 8.000.000 francs CFA, le Président TALON a méconnu la Constitution.

INSTRUCTION DU RECOURS:

Considérant que le Président de la République et le ministre de l’Economie et des Finances n’ont pas cru devoir répondre aux correspondances de la Cour leur demandant de faire tenir à la haute Juridiction leurs observations, de mettre à sa disposition les fiches de paie des ministres et le décret actuel portant détermination du traitement, des avantages et des indemnités des membres du Gouvernement ;

ANALYSE DU RECOURS:

Considérant que le requérant demande à la Cour d’apprécier la discrimination dans le traitement des membres du Gouvernement et des conseillers de la Cour constitutionnelle ;
Considérant que les articles 26 de la Constitution, 10 de loi organique sur la Cour constitutionnelle disposent respectivement :
« L’état assure à tous l’égalité devant la loi sans distinction d’origine, de race, de sexe, de religion, d’opinion politique ou de position sociale.
L’homme et la femme sont égaux en droit. L’Etat protège la famille et particulièrement la mère et l’enfant. Il veille sur les handicapés et les personnes âgées » ; « Les membres de la Cour constitutionnelle reçoivent un traitement fixé par la loi ; ce traitement est égal au moins à celui alloué aux membres du Gouvernement.
Ils ont en outre droit à des avantages et indemnités fixés par la loi et qui ne sauraient être inférieurs à ceux accordés aux membres du Gouvernement » ; qu’il résulte de ses dispositions que les ministres et les membres de la Cour constitutionnelle doivent bénéficier sans discrimination des mêmes traitements, avantages et indemnités ;
Considérant qu’en réponse à la demande de transport judiciaire et à la mesure d’instruction adressées au directeur général du Trésor et de la Comptabilité publique, le directeur adjoint du Trésor et de la Comptabilité publique, Monsieur Thierry B. A. DOSSA, met à la disposition de la Cour, le décret n° 2006-187 du 30 avril 2006 portant fixation du traitement des membres du Gouvernement et le décret n° 2017-042 du 25 janvier 2017 portant traitement et régime indemnitaire applicables aux préfets, aux secrétaires généraux de département et aux chargés de mission des préfets ; que le silence du Président de la République et du ministre de l’Economie et des Finances aux mesures d’instruction de la Cour ne permet pas à la haute Juridiction d’établir l’effectivité de la discrimination alléguée, que dès lors, il échet pour la Cour de dire et juger qu’il n’y a pas lieu à statuer en l’état ;

D E C I D E :

Article 1er : Il n’y a pas lieu à statuer en l’état.
Article 2 : La présente décision sera notifiée à Monsieur Paul MAPOGA, à Monsieur le Directeur général adjoint du Trésor et de la Comptabilité publique et publiée au Journal officiel.

Ont siégé à Cotonou, le vingt février deux mille dix-huit,
Messieurs Théodore HOLO Président
Zimé Yérima KORA-YAROU Vice-Président
Bernard D. DEGBOE Membre
Madame Marcelline-C. GBEHA AFOUDA Membre
Monsieur Akibou IBRAHIM G. Membre
Madame Lamatou NASSIROU Membre

Le Rapporteur,
Akibou IBRAHIM G.-

Le Président,
Professeur Théodore HOLO.

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