Amnistie de Simone Gbagbo: la politique doit-elle remplacer la justice en Afrique?

Lors de la veille de la commémoration de sa 58eme anniversaire de l’accession de la cote d’Ivoire à l’indépendance le lundi 06 août, le président Ouattara a annoncé dans son discours à la nation qu’il amnistie 800 personnes inculpées plus tôt dans les crises post- électorales de 2011 ayant fait plus de 3000 morts. La justice est elle impossible en Afrique? La Politique fait elle écran à la justice?

Au constat, la justice africaine est impuissante, elle est dominée par la politique politicienne. Ainsi, elle doit suivre les ordres de Mr le président. Si non dans aucun pays sérieux du monde au 21 eme siècle c’est inimaginable que des acteurs d’instabilité,  orchestrent des tueries, sacrifient des vies humaines pour des intérêts personnels, s’installent au pouvoir, et subitement deviennent juge pacifique, acteur de réconciliation, de paix, de dédouanement, d’amnistie. Décidément, comble du ridicule!

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Certes, la politique c’est la « ruse » selon le penseur politique moderne Nicolas Machiavel mais une ruse au service de l’Etat et non au service du chef. c’est vrai que pour le florentin, la politique est amoral et se conçoit donc par delà le bien et le mal. Ainsi, ce qui compte en politique c’est bien les résultats et non les considérations éthiques. Et même là-dessus, la  politique par delà le bien et le mal dont parle Machiavel, le gouvernant doit l’appliquer selon lui, seulement pour les intérêts supérieurs de la nation, de l’Etat et non pour des appétits de circonstances où des élucubrations des hommes politiques les poussent à contrario à se servir de l’Etat. Pour Machiavel, le gouvernant ne se sert pas de l’Etat mais il le sert. Et pour servir l’Etat nous dit Machiavel force doit être donnée à la loi, à la justice. Pour ce penseur, il n’est pas juste que les barrons écrasent le peuple. En Afrique, on assiste à tout le contraire chez ceux qui prétendent nous gouverner.

Ainsi, la justice est elle conditionnée, contextuelle, telle un caméléon, elle prend la couleur des circonstances politiques, des régimes politiques, des puissances intérieures et extérieures. A preuve, lorsque en Afrique des crimes se commettent en contexte électoral, le traitement réservé aux incriminés est différents que lorsque les mêmes crimes se commettent en plein mandat. De plus, le traitement ou le règlement de ces cimes varie suivant les déterminants de vengeance politique ou au mieux suivant les calculs politiques.

L’amnistie accordée par Ouattara est un calcul politique qui entérine la justice en berne en cote d’ivoire

L’amnistie intervenue en cote d’ivoire à moins de deux ans de la fin du mandat du président Ouattara semble s’inscrire dans cette logique de calcul politique après bien entendu celle de la vengeance et de la revanche du camp Ouattara sur le camp Gbagbo qui a coûté la prison à Laurent Gbagbo toujours gardé en cellule à la Cour Pénale Internationale et des feuilletons judiciaires à bien d’autres proches dont son épouse Simone. A proprement parler, la justice a été mise en berne en cote d’Ivoire depuis que sous la menace politique et des armes, les premiers résultats proclamés par la cour constitutionnelle et qui donnaient Gbagbo vainqueur des élections ont été révoqués, renversés et inversés pour donner enfin Allassane Ouattara vainqueur.

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or sur le terrain politique le vainqueur qui n’a pas combattu et vaincu avec les lois mais avec la force et les armes ne peux pas juger et traiter juridiquement, une situation dont lui même est fautif. Hissé au pouvoir de façon inique et injuste, Il est donc contraint bon gré mal gré de gracier à un moment ou à un autre le camp adverse. c’est ça la ruse politique.  s’il ne le fait pas à temps et si la fortune fait en sorte que les vaincus d’antan retrouvaient un jour l’opportunité, il peuvent reprendre du poil de la bête et se venger. « Le plus fort n’est jamais assez fort pour être toujours le maître, s’il ne transforme pas sa force en droit et l’obéissance en devoir » nous apprend le philosophe du droit, le révolutionnaire et subversif Jean Jacques Rousseau.

Mais le devoir est mal compris ou subis un vrai désamour auprès des dirigeants africains. si non; comment comprendre qu’au 21eme siècle dans un continent qu’on appelle berceau de l’humanité, des oligarques éhontés organisent de façon récurrente, à leur gré et ce depuis les supposés accessions à l’indépendance, des boucheries humaines à cause de leurs appétits du pouvoir. Et comme si cela ne suffisait pas, la justice pour les victimes devient le dernier rempart pour se protéger, protéger ses arrières et se donner bien que partisan et artisan de violence inouïe et inhumaine la réputation d’homme de paix.

D’ailleurs, la justice internationales incarnée par la CPI elle aussi se moque de la justice en Afrique. Si non elle devrait mettre le grappin et sur Ouattara et sur Gbagbo, Tutti Quanti. Si non, ni Ouattara ni Gbagbo ne sont plus dignes de diriger la cote d’ivoire, de parler en son nom depuis qu’ils ont sacrifié le pays en se disputant le pays tel un trophée.

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En effet, la fibre patriotique caractéristique majeure d’un homme d’Etat est la chose la moins partagée par les hommes d’Etat africains. D’où les principes sont foulés au pied, la justice pris en otage pour ne pas dire assassinée ou à tout le moins toujours instrumentalisée. ceci se justifie d’autant plus que l’amnistie de Ouattara est l’écho favorable qu’il donne aux lobbys, aux observateurs de la gestion faite de l’après crise et qui lui mettent depuis belle lurette pression afin qu’il fabrique la réconciliation en lieu et place d’une justice d’ailleurs morte dans l’œuf du fait que l’injuste ne peux pas produire son contraire: « On ne cueille pas des figues sur des épines, et l’on ne vendange pas des raisins sur des ronces. » nous enseigne Jésus, le prince de la paix, le miséricordieux mais à la fois le juste. Lc 6- 44.

En dehors des nombreux morts qui ont marqué depuis 2002 la quête du pouvoir de  Ouattara et face à laquelle la justice ivoirienne et internationale est restée muette, la crise post-électorale de 2011 ayant fait de nombreux morts, 3000 selon certaines estimations n’aura aucune issue en terme de justice, puisque la politique de la force dicte sa loi à la gouvernance juste en Afrique. Et il y a une tendance générale en Afrique à minimiser, à relativiser les crimes électorales qui finissent à se muer dans un déni des crimes électorales. Tout dans les comportements porte à croire que les crimes électorales sont excusables ou ne sont pas jugeables.En Afrique, la justice n’est pas pour demain.

La férocité, la démagogie, les crimes odieux, l’impunité, voilà l’enfer quotidien servi en Afrique, une Afrique malade de ses dirigeants et de la françafrique quand on sait le rôle macabre joué par la France en tant que partisane de cette crise ivoirienne et de bien d’autres crises politiques en Afrique.

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