France : les vraies raisons de la démission de Nicolas Hulot du gouvernement

Le désormais ex-ministre de la Transition écologique et solidaire a évoqué une série d’arguments pour expliquer son départ.

Le ministre de la Transition écologique et solidaire Nicolas Hulot a annoncé, mardi 28 août sur France Inter, sa démission du gouvernement, invoquant une décision « lourde, qui le bouleverse » et « mûrie depuis de longs mois ». Il a précisé l’avoir prise lundi soir, sans en référer à Emmanuel Macron ni à Édouard Philippe, et pas même « à [sa] propre épouse ». L’ancien animateur a donné plusieurs explications à son départ, rapporte Franceinfo.

Le gouvernement n’est pas « à la hauteur » des enjeux

« Est-ce que nous avons commencé à réduire l’utilisation de pesticides ? La réponse est non, a déploré Nicolas Hulot. Est-ce que nous avons commencé à enrayer l’érosion de la biodiversité ? La réponse est non. Est-ce que nous avons commencé à nous mettre en situation d’arrêter l’artificialisation des sols ? La réponse est non ».

« Nous faisons des petits pas, et la France en fait beaucoup plus que d’autres pays, mais est-ce que les petits pas suffisent… la réponse est non, a-t-il poursuivi. Je ne veux pas donner l’illusion que ma présence au gouvernement signifie qu’on est à la hauteur sur ces enjeux-là. »

Est-ce qu’on essaie d’être disruptif, est-ce qu’on s’est autorisé à essayer sortir de l’orthodoxie économique et financière ? On me dit : soit patient. Mais ça fait trente ans qu’on est patients ! On me dit : fixe-toi deux ou trois priorités. Mais tout est prioritaire ! »

Nicolas Hulot à France Inter

Nicolas Hulot a assuré qu’il gardait « une profonde admiration » pour Emmanuel Macron et Edouard Philippe. « Mais sur les sujets que je porte, on n’a pas la même grille de lecture. On n’a pas compris que c’est le modèle dominant qui est la cause ? Est-ce qu’on le remet en cause ? »

La réunion sur la chasse a peut-être « achevé de le convaincre »

Nicolas Hulot a indiqué avoir pris sa décision lundi 27 août au soir, à l’issue d’une réunion à l’Élysée avec des représentants des chasseurs, à laquelle un lobbyiste non-invité avait participé. « J’ai pris cette décision hier soir. Elle a mûri cet été. »

« Ça va paraître anecdotique, a-t-il expliqué en revenant sur cette réunion à l’Elysée, mais pour moi, c’était symptomatique et c’est probablement un élément qui a achevé de me convaincre que ça ne fonctionne pas comme ça devait fonctionner ».

« On avait une réunion sur la chasse, avec une réforme qui est peut-être une réforme importante pour les chasseurs, mais surtout pour la biodiversité, a précisé le ministre démissionnaire. Et j’ai découvert la présence d’un lobbyiste qui n’était pas invité à cette réunion. Et c’est symptomatique de la présence des lobbies dans les cercles de pouvoir. Il faut, à un moment ou à un autre, poser ce sujet sur la table, parce que c’est un problème de démocratie : qui a le pouvoir, qui gouverne ? »

Ne pensons pas que ma décision vient simplement d’une divergence sur la réforme de la chasse. C’est une accumulation de déceptions, mais c’est surtout parce que je n’y crois plus

Nicolas Hulot à France Inter

Il ne voulait plus « se mentir »

Nicolas Hulot l’a reconnu sur France Inter, il a vécu sa présence au gouvernement comme une souffrance ces derniers mois. « Oui, c’était une souffrance, a-t-il confié. Sauf à basculer, ce que peut être j’allais devenir, cynique et finir à avoir une sorte d’indifférence sur les échecs. Je me suis surpris parfois par lassitude à baisser les bras et à baisser mon seuil d’exigence. Là, je me suis dit que c’était le moment d’arrêter. (…) Je ne veux plus me mentir. »

« Sur un enjeu aussi important, je me surprends tous les jours à me résigner, à m’accommoder de petits pas, alors que la situation universelle, au moment où la planète devient une étuve, mérite qu’on change d’échelle. C’est une décision d’honnêteté et de responsabilité. »

« C’est une décision entre moi et moi », a-t-il résumé, reconnaissant que « personne n’était au courant, y compris [sa] propre épouse ». « Qui serait à la hauteur tout seul ? s’est-il interrogé. Où sont mes troupes, qui ai-je derrière moi ? ». L’ex-ministre décrit une forme de lassitude. « C’est une accumulation de déceptions, mais c’est surtout parce que je n’y crois plus. » Nicolas Hulot avait-il les épaules pour être ministre ? « Peut-être pas, a-t-il reconnu, répondant aux questions de Léa Salamé et Nicolas Demorand. La question vaut d’être posée. » Regrette-t-il pour autant d’avoir occupé ce poste ? « Pas une seconde. »

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