« La réforme des cautions (électorales) », une chronique de Sulpice Oscar Gbaguidi

A moins d’un énorme retournement de situation, le relèvement des cautions devrait être acté. 250 millions pour la présidentielle et 200 millions pour les législatives. La commission des lois du Parlement a opéré à chaud. Elle a adopté la proposition de loi portant code électoral au Bénin. Les candidats à la fonction suprême et les listes à la députation ne s’aligneront plus dans la course au prix de miettes. Le couperet financier est bel et bien dans la sphère électorale.

Dans le Bénin en proie à la polémique permanente, les sanglots s’accompagnent d’une théorisation de la mort de la démocratie. Aidé alors par la grande hypocrisie et l’allergie aux changements, l’emballement anti-réforme expédie ses excès. Pourtant, notre système partisan est absurde. Cette seule évidence inhibe la polémique.

La pétaudière partisane perçue abusivement comme signe de la vitalité de la démocratie a jusqu’ici donné des ailes aux boute-en-train qui prenaient d’assaut les starting-blocks des présidentielles. Ce n’est pas étonnant que les 250 millions de fcfa de caution provoquent un séisme et une vaine levée de boucliers. Et on n’est non plus pas surpris qu’au nom de la démocratie, les défenseurs du pluralisme intégral crient, par instinct, au scandale et chaussent les bottes anti-rupture. Que les 200 millions proposés pour la caution des législatives fassent monter l’adrénaline dans la galerie ! Réaction mécanique et pathétique.

Le scénario de la polémique n’est pas inédit. Sauf que depuis avril 2016, la gouvernance ne cède plus aux sirènes alarmistes et aux tendances sclérosées. La logique des blocs politiques se dessine avec ce fort relèvement des cautions. Les 250 millions devraient refroidir les aventuriers et autres menus-fretins habitués à distraire l’opinion. Les 200 millions pour les listes aux législatives portent des exigences majeures : la structuration des partis, la naissance d’alliances durables et la vraie quête de la représentativité.

Au-delà de la gestion du pouvoir, les logiques d’élections auront pour socle la nécessité de préserver une image et une identité politique. Les sauts individuels dans l’arène et les calculs trop mercantiles avaient altéré la vocation politique. Le Bénin a un impératif politique , celui d’aller vers une démocratie mature. La structuration de l’espace politique devient donc une urgence. Le relèvement des deux cautions va donner un coup d’accélérateur à cette solidarité politique indispensable à la formation des blocs. Sur le chantier des réformes du système partisan, on est désormais à un point de non retour.

Présidentielle des riches ou candidatures d’argent ? Cette accusation est légère et se nourrit de préjugés assortis d’une volonté de diversion. L’expérience dément les craintes et critiques vaguement répandues. Pour briguer la plus haute fonction de l’Etat, il faut avoir soi-même les moyens financiers énormes ou avoir le soutien de puissances financières. Les indigents du lot étaient condamnés à des scores humiliants. La forte caution permettra aux candidats de tester leur capacité à collecter des fonds. L’aptitude d’un parti ou d’un candidat à lever des fonds est un signe évident de sa représentativité.

On devrait déjà penser à introduire à terme, un autre critère , le parrainage des élus pour les candidats à la présidentielle. Le filtre sélectif taillé avec la caution des 250 millions et le parrainage entrainera l’assainissement des starting-blocks et la fin de l’ère des plaisantins. Qui osera verser une somme faramineuse au Trésor public pour seulement flatter ses instincts de clowns ?

Le sésame de la Marina et les clés du Palais des Gouverneurs exigent des postulants sérieux. L’Assemblée nationale, sanctuaire de la politique, connaît mieux que quiconque, les dédales et incongruités du système partisan. Les députés voteront pour la réforme des cautions. Sans coup férir.

Sulpice Oscar GBAGUIDI

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