Bénin: la création de la Criet engendre la fragmentation de la justice selon l’Unamab

Ils ont enfin donné de la voix par rapport à la création de la Cour de Répression des Infractions Economiques et du Terrorisme (Criet). Ils, ce sont des magistrats réunis au sein de l’Union Nationale des Magistrats du Bénin (Unamab), qui à travers une Assemblée générale tenue le vendredi 26 octobre 2018 ont donné leurs avis sur cette spéciale Cour qui suscite la polémique depuis sa création.

La création de la Criet a été l’une des points abordés lors de l’Assemblée générale de l’Unamab. Ce point a permis aux magistrats d’opiner sur les compétences, attributs et contexte de création de la Cour spéciale chargée des dossiers relatifs aux crimes économiques, terrorisme et au trafic de drogue.

Selon les analyses des membres de l’Unamab, de nombreuses dispositions contenues dans la loi 2018-13 du 2 juillet 2018 modifiant et complétant la loi 2001-37 du 27 août 2002 portant organisation judiciaire en République du Bénin et création de la Cour de répression des infractions économiques et du terrorisme (CRIET) sont « attentatoires aux principes fondamentaux de la justice notamment le principe du double degré de juridiction et celui de la séparation des pouvoirs ».

Par exemple, au niveau de l’article 19 de la loi portant création de la Criet, l’Unamab relève un paradoxe qui confond le législateur.

En effet, au sein de l’article 19 de ladite loi, la CRIET statut en premier et dernier ressort. Paradoxalement, c’est pour faire bénéficier du principe du double degré de juridiction aux personnes poursuivies pour des faits de nature criminelle que la même législature a voté une loi supprimant les sessions d’assise. Ainsi, le jugement des crimes a été attribué aux tribunaux de première instance avec la possibilité pour les accusés de relever appel. Cette volonté affichée de renforcement des garanties procédurales dans la poursuite des crimes ordinaires tranche maintenant avec les règles instituées pour les jugements des affaires connues par la CRIET.

Extrait du communiqué finale de l’AG

Mais ce qui justifie encore plus les inquiétudes des magistrats c’est la confusion engendrée par la création des juridictions spéciales ou thématiques dans l’organisation judiciaire. Selon eux, la création de la Criet et l’installation du tribunal de commerce de Cotonou participent à la destruction et à la fragmentation de l’appareil judiciaire. « …Cette pratique consistant à retirer aux juridictions ordinaires des pans entiers de leurs attributions et à les confier à des juridictions spéciales, participe de la déstructuration de l’appareil judiciaire. Cette fragmentation de la justice crée une confusion, un flou artistique sur le rôle et la place de la CRIET dans l’ordonnancement judiciaire. Ce constat est aggravé par le cumul de fonction de certains magistrats. […] », ont-ils fait remarquer.

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