Bénin: évaluation des ministres de Patrice Talon sur l’emploi (les notes sur 10)
Depuis l’élection du Président Talon, la situation sociale des béninois n’a guère évoluée et s’est même globalement dégradée. De nombreux béninois ont perdu leur emploi, d’autres n’ont pas vu leur salaire évolué alors même que le coût de la vie a augmenté . Certains ont pu trouver un emploi, mais celui ci est souvent mal payé et précaire. Seuls quelques rares chanceux ont pu accéder à des emplois bien rémunérés ou bénéficier d’augmentations.
La situation du Bénin n’est pourtant pas une fatalité, et alors que le Président Talon a fait campagne sur la lutte contre la fatalité, force est de constater que les résultats ne sont pas à la hauteur. Les entreprises qui ont les moyens de rémunérer convenablement leur employés sont pour la plupart détentrices de contrats publics, ce qui crée des doutes sur la stabilité de l’activité économique à l’approche de chaque élection. Face à cette situation, il est temps de pointer du doigt les responsabilités. Si blâmer le Président Talon est facile, ses défenseurs vous diront que son mandat n’est pas fini et qu’il a le temps de redresser la barre. Pour les ministres, le cas est différent. N’ayant pas été choisi par le peuple mais plutôt par le Président, ils devraient être le premier fusible à sauter en cas d’échec. Il est donc temps de pointer du doigt ces ministres qui ont échoué à leur mission.
Le Ministre d’État Abdoulaye Bio Tchané : 2/10
Souvenez vous lors de la campagne présidentielle de 2016, le Ministre Bio Tchane promettait la création de 100.000 emplois par an en République du Bénin. Après plus de deux ans en fonction, le bilan est triste pour ne pas dire plus. L’action du ministre a été inexistante si ce n’est pour mettre 500 béninois au travail dans le cadre du projet Bénin Taxi ou encore, pour appuyer l’installation d’une usine de transformation de coton dans la région de Djougou, son fief électoral.
Le bilan est famélique et le total atteint serait difficilement compter à deux ou trois mille emplois en près de 3 ans. Le Ministre Bio Tchane a été très discret lorsque les employés de Cajaf Comon, de Glo Mobile ou encore de CDPA ont été mis au chômage. En tant que Ministre du Plan et du développement, son plan est toujours attendu pour redresser l’emploi au Bénin. En tant que deuxième personnalité du gouvernement, le Ministre ne peut dire qu’il n’a pas disposé des pouvoirs pour conduire une politique dynamique pour créer des emplois au Bénin. La sévérité de sa note se justifie par le fait qu’en tant qu’ économiste, on aurait espéré mieux que la chute de tous les indicateurs importants en matière d’emplois au Bénin. Ce 2/10 est donc largement mérité et le Président Talon devrait sérieusement songer au cas de son collaborateur.
Le Ministre des Finances Romuald Wadagni: 3/10
Lorsqu’on prétend avoir exécuter un budget de 2010 milliards, il faut assumer sa parole. Soit ce budget n’a pas été réellement exécuté et là le Ministre Wadagni a menti devant l’Assemblée Nationale ce qui est très grave, soit ce budget a réellement été exécuté et alors, on se pose la question de savoir où se sont évaporés tous ces milliards. Dans les deux cas, ça sent très mauvais pour le Ministre qui n’a pas été à la hauteur de sa réputation. Incapable de mobiliser des ressources, il n’a cessé d’avoir recours aux emprunts à court terme tout en étant le bras exécutant des décisions de conflit d’intérêt entre le Président et ses entreprises en situation de monopole. En exonérant les sociétés du Président Talon et en redressant ou en « matraquant » fiscalement le reste des opérateurs économiques et commerçants du pays, le Ministre est le symbole de la frustration du milieu des affaires.
Toutes ces mesures ont directement contribué au chômage des béninois. Ainsi, plusieurs sociétés ont du licencié leurs employés pour cause d’incapacité de paiement de salaires. Les dettes intérieures du Bénin n’ayant pas été remboursées, plusieurs sociétés se retrouvent incapables de rémunérer leurs salariés. Par ailleurs, le matraquage au niveau des cordons douaniers a découragé de nombreux importateurs car comme on le dit » Trop d’impôts tue l’impôt ».
Le Ministre n’a pas pris la mesure de son rôle sur l’économie et l’emploi au Bénin. Sa volonté d’imposer une taxe sur les réseaux sociaux a définitivement rompu le lien entre lui et les béninois. Les trois points qui lui sont accordés sont dus à d’indulgence à avoir envers un jeune comparé au Ministre ABT qui lui, est présent depuis des années dans le milieu politique et économique. De plus, il faut noter la modernisation des outils au niveau des régies financières qu’on peut mettre à l’actif du jeune Ministre.
Le Ministre des Affaires Étrangères Aurélien Agbenonci: 4/10
Le rôle de Premier diplomate d’un pays est de tisser des liens et de mener des négociations permettant de servir les intérêts stratégiques de son pays. Le Bénin étant un pays stable et en paix, le seul intérêt stratégique à défendre est celui de son développement économique. Une tâche bien plus simple au Bénin qu’ailleurs, et pourtant, l’action du ministre des affaires étrangères est minime pour les intérêts du Bénin, ce qui impacte directement l’emploi.
Tout d’abord, les relations difficiles entre le Bénin et le Nigeria depuis la venue au pouvoir du Président Talon n’ont pas été gérées comme il le fallait afin de négocier des accords bilatéraux qui auraient permis de sauver les filières véhicules d’occasion et friperie. L’inactivité des réseaux diplomatiques ont laissé la situation se tendre pendant de longs mois. Ensuite, de nombreux financements issus de banque islamique ont été mis en suspend pendant un temps à cause de l’opération de déguerpissement qui a impacté des lieux de cultes musulmans. Là encore, la diplomatie se devait d’anticiper et de régler les malentendus.
Mais surtout, alors que la diplomatie coûte des milliards au Béninois, nous constatons que rien n’est fait pour, à la fois créer des programmes d’échanges de compétences comme par exemple avec Cuba dans le domaine de la santé, alors que leur système est reconnu mondialement. Il n’y a également pas d’avancée dans l’implantation d’entreprises étrangères dans des secteurs porteurs mais non exploités au Bénin, une véritable source d’emploi. Le rôle d’un Ministre des Affaires Étrangères au Bénin ne peut se limiter à serrer des mains et signer des accords de dons ou de prêts. Un pays ne se développe pas en acceptant du poisson mais plutôt en pêchant.
Le bilan de Aurélien Agbenonci est très moyen sans forcément devoir le remplacer, il serait peut-être tant de lui notifier clairement ses priorités.
Le Ministre de la Justice Séverin Quenum: 4/10
La mise en place de la CRIET aura été jusque-là son principal fait d’arme, et cela affecte grandement son action. Une cour sans recours et ou les droits de la défense sont bafoués, une cour d’exception qui nous ramène aux heures les plus noires de la dictature de Mathieu Kerekou, une période où Adrien Houngbedji avait été condamné à mort.
Ces conclusions sont celles de l’ordre des avocats mais également celle du comité de soutien aux détenus politiques et aux exilés. L’impact sur l’économie et l’emploi réside dans le manque de confiance des privés en la justice de leur pays. En effet, avec le sentiment qui s’installe d’une justice aux ordres, les investisseurs nationaux comme étrangers peuvent craindre des procédures arbitraires à leur égard.
La justice étant un des piliers d’une démocratie et une caution pour un investisseur, le Ministre Quenum n’a pas contribué à renforcer son indépendance, ce qui impacte l’économie Béninoise.
Le Ministre de l’industrie et du commerce Serge Ahissou: non noté
Son bilan est transparent et sa présence au gouvernement est une énigme, par souci de ne pas le noter trop sévèrement, nous avons préféré considérer qu’il était absent lors de l’examen.
Le Ministre de l’agriculture Gaston Dossouhoui: 4/10
Encore un Ministre quasiment invisible et inactif qui ne s’est fait remarquer que pour défendre le Glyphosate au moment où partout dans le monde, ce produit est condamné. Alors que la Rupture se veut être un régime de réforme, aucune réforme agraire, aucun plan de diversification de la production agricole, aucun effort de mécanisation ou d’irrigation n’est porté par ce Ministre qui a fait du ministère de l’agriculture, une direction technique de l’industrie cotonnière au Bénin.
Le Ministre des PME et de l’Emploi des jeunes Modeste Kerekou: 4/10
Étant le Ministre de l’emploi des jeunes, Modeste Kerekou devrait être noté plus sévèrement que tous les autres, mais quand on connait le faible poids que représente ce Ministère et ce Ministre dans le système Talon, il serait injuste de l’accabler. En acceptant de se charger de l’emploi des jeunes, le fils du Général devait se douter que la tâche serait rude et qu’il ne pourrait échapper aux foudres. Si on peut saluer son courage, son inefficacité doit quand même être soulignée. L’action de Modeste Kerekou se limite à reproduire le programme de microcrédit mis en place sous Yayi et si souvent critiqué par les soutiens du Président Talon pendant la campagne…
Le Ministre du Cadre de Vie José Tonato: 7/10
Si techniquement, ce n’est pas le portefeuille du Cadre de Vie qui doit impacter sur l’emploi au Bénin, force est de constater que ce Ministère est le plus actif dans le dynamisme que peut impulser le gouvernement. Que ce soit l’asphaltage, la modernisation des marchés ou encore la protection des côtes, les projets initiés au Cadre de Vie sont porteurs d’emplois pour plusieurs béninois et cela pour les 2 prochaines années.
Pour ce dont le Ministre Tonato a à se charger, il faut lui reconnaître une activité efficace et des évolutions visibles. Le carnet de commande des entreprises chargées de réaliser ces ouvrages est plein, ce qui favorise l’embauche. Il est important que le Ministre aille plus loin dans ses reformes pour l’environnement comme il a pu le faire avec les sachets bio dégradables. En effet, le recyclage des déchets est un enjeu d’avenir porteur d’emplois plus durables que des marchés publics. Globalement, s’il existe un Ministre sur lequel Patrice Talon devrait s’appuyer, ce serait celui là, un homme qui d’ailleurs semble ne pas se mêler de politique et qui gagnerait à occuper d’autres fonctions ou alors plus de moyens dans sa mission vu qu’il les exploite mieux que les autres.
Les Ministres qui n’ont pas été notés sont ceux dont l’action n’est pas directement liée à l’emploi des jeunes, ou ceux dont l’action est trop insignifiante pour qu’elle puisse être notée. C’est notamment le cas de la Ministre de l’Économie Numérique.
Le Président Talon a donc du pain sur la planche pour redonner un nouveau souffle à une équipe qui a globalement échoué sur les questions d’emploi. Y aura t-il un remaniement avant ou après les législatives?
Les commentaires sont fermés.