Bénin – Affaire Ajavon: ce que risque l’Etat en cas de boycott de la décision de la CAfDHP

Depuis le vendredi 07 décembre 2018, l’affaire dite de « 18 kg de cocaïne » dans laquelle est impliquée Sébastien Ajavon a connu un nouveau rebondissement. La Cour africaine des droits de l’homme et des peuples (CAfDHP) a en effet demandé à l’Etat de surseoir à l’exécution du verdict de la CRIET contre les mis en cause. En attendant de savoir ce que le gouvernement béninois fera de cette décision, Me Bensimhon s’est permis de rappeler les sanctions qui peuvent découler d’un boycott de l’ordonnance de la CAfDHP.

Si après l’ultimatum de 15 jours donné par la CAfDHP, l’Etat béninois ne met pas en application la décision portant suspension provisoire de la condamnation de Sébastien Ajavon et ses co-accusés, à quoi doit s’attendre le Bénin? Le Président du collectif des avocats de la défense a répondu à cette question pour édifier plus d’un. Selon les déclarations de Me Bensimhon sur la chaîne AFRICA 24, le Bénin risque des sanctions de la part de l’Union Africaine (UA), si elle est saisie par la Cour.

Ainsi, la Conférence des chefs d’Etat de l’UA peut mettre « au banc des nations » le Bénin. Selon Me Bensimhon, cette action pourrait avoir de graves conséquences sur les relations diplomatiques entre le Bénin et les autres pays. Mieux, la Conférence des Chefs d’État pourrait aussi mettre un embargo sur les appuis financiers dans le cadre de l’aide au développement que l’UA applique habituellement.

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Au vu de ces possibilités de sanction qui ne sont pas sans conséquences pour le Bénin, l’avocat a souhaité que le gouvernement béninois puisse se conformer à la décision de la CAfDHP. Pour lui, c’est la meilleure manière de ramener la balle à terre afin que la procédure en cours devant la CAfDHP puisse continuer sans obstacles.

Retour sur les faits

L’affaire « 18 kg de cocaïne pure » remonte à octobre 2016, précisément le vendredi 28 octobre 2016 où Sébastien Ajavon a été interpellé par la compagnie de gendarmerie maritime du Port de Cotonou, alors qu’il animait un point de presse sur la découverte de cocaïne dans un container destiné à sa Société Cajaf Comon. Selon les sources sécuritaires, les 18 kg de cocaïne avoisinent un montant de 9 milliards.

Après son interpellation, il sera conduit à la brigade maritime en compagnie de trois de ses employés. Quelques heures après, le véhicule transportant les mis en cause prit la direction de l’Office spécialisée dans la lutte contre le trafic de drogue (Ocertid). Contre toute attente, les responsables de l’Office refusent d’auditionner Sébastien Ajavon et ses employés au motif qu’ils n’ont pas été associés à l’opération de saisine de la cocaïne. Le convoi rebrousse alors chemin et atterrit cette fois-ci à la direction régionale de la gendarmerie, où les mis en cause seront gardés à vue toute la nuit.

C’était le début d’une garde à vue qui finalement va durer huit jours. Pour finir, le président du patronat béninois sera jugé le 05 novembre 2016 au cours d’un procès en comparution immédiate au cours duquel, l’homme d’affaire a été libéré au bénéfice du doute après avoir nié toute implication dans une affaire de trafic de drogue et plaidé non coupable tout en dénonçant un complot politique contre sa personne.

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Malgré sa libération au bénéfice du doute, Sébastien Ajavon compte laver son honneur et refaire son image aux yeux de ses partenaires d’affaires. C’est pourquoi, il a traduit l’Etat béninois devant la Cour africaine des droits de l’homme et des peuples (CAfDHP) et réclame à ce dernier, une somme estimée à  550 milliards de francs cfa pour dommage et intérêts.

Quand la Criet surgit et bouleverse le cours des événements

Pendant que le procès contre l’Etat béninois est suspendu devant la CAfDHP, la Cour de Répression des Infractions Economiques et du Terrorisme (Criet) a vu le jour au Bénin. Selon les textes qui régissent sa création et son fonctionnement, elle est désormais chargée de gérer les dossiers ayant rapport avec les crimes économiques, le terrorisme et le trafic de drogue.

Après ses deux premières audiences, la Criet a jeté son dévolu sur le président du Patronat. Surprise générale, Sébastien Ajavon reçoit une convocation pour se présenter devant la nouvelle Cour le 04 octobre 2018 dans le cadre de l’affaire « 18kg de cocaïne ». Le parti politique dont il est président d’honneur est aussitôt monté au créneau pour donner de la voix.

Dans un communiqué rendu public, le parti USL a rappelé que le dossier pour lequel l’homme d’affaires Sébastien Ajavon est convoqué à la Criet a été déjà traité par le Tribunal de Cotonou qui a relaxé les mis en cause. Mieux, le Bureau Politique du parti affirme que Sébastien Ajavon détient un certificat de non appel, ce qui voudrait dire que personne n’a fait appel suite à la décision du tribunal. Les avocats de la défense sont aussi venus en renfort pour faire savoir que leur client ne peut être poursuivi une seconde fois à raison des mêmes faits.

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Malgré toutes les démonstrations visant à justifier l’inopportunité de la convocation, Sébastien Ajavon et ses co-accusés devront se rendre à la Criet. Mais ceux-ci ont choisi de ne pas y être physiquement présents. Ainsi, le 04 octobre 2018, le juge en charge de l’affaire s’est vu devant les avocats de la défense mandatés pour parler au nom des mis en cause.

Cette option n’a pas reçu l’assentiment de la Cour. Elle a donc décidé de renvoyer le dossier au 18 octobre 2018 avec la présence effective des mis en cause. Mais pour une seconde fois, ceux-ci ont brillé par leur absence en se faisant représenter par leurs avocats. Cette fois-ci, il n’y a pas eu de report. Le procès s’est bien déroulé mais en absence des mis en cause et de leurs avocats, sortis de la salle à cause du silence qui leur a été imposé.

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A l’issue du procès, Sébastien Ajavon et ses co-accusés écopent de 20 ans de prison ferme et 5 millions d’amende. N’ayant pas été retrouvé depuis l’adresse de la convocation, un mandat d’arrêt a été délivré à leur encontre. Sébastien Ajavon qui a trouvé refuge en France avant la condamnation a aussitôt déposé une demande d’asile politique auprès de l’OFPRA. Selon l’un de ses avocats, ceci devrait permettre à l’homme d’affaire de se mettre à l’abri en attendant que les moyens judiciaires soient employés pour casser la décision de la Criet.

Sébastien Ajavon au-delà des affaires

L’homme a fait son entrée dans l’univers politique suite à sa participation aux élections présidentielles de 2016 où il est arrivé troisième, derrière l’ancien premier ministre Lionel Zinsou de l’ex-régime et lui derrière l’actuel Président de la République. Au second tour des élections, il s’est allié au candidat Patrice Talon, ce qui a été sans doute d’un poids considérable dans la victoire de ce dernier. Mais, à la grande surprise de tous, le divorce entre les deux hommes est intervenu quelques mois après l’investiture de Patrice Talon.

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A en croire Sébastien Ajavon, ce divorce est le fruit du non respect par le Président Patrice Talon de l’accord politique établi entre ce dernier et lui. Il a donc choisi de lui tourner le dos pour s’inscrire officiellement dans l’opposition. Depuis quelques semaines, les activités politiques de l’homme sont devenues formelles par le biais du parti USL dont il est le Président d’honneur.

Notons qu’il y a quelques années, Sébastien Ajavon annonçait son dégoût pour la politique; mais aujourd’hui, il est un homme influent du milieu. Pour une première participation aux élections présidentielles, il se retrouve en troisième position devant des habitués de la chose politique.

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