Bénin – Allocations universitaires : Patrice Talon désavoué, la DBSU dans le dilatoire

Le discours sur l’état de la Nation prononcé par le président Talon, continue de susciter des réactions dans l’opinion publique béninoise. Loin des intrigues politiques, les responsables étudiants ont désavoué, chiffres à l’appui, le chef de l’Etat sur la question de l’apurement des allocations universitaires. A la Direction des bourses et secours universitaires (DBSU), il est autant difficile de corroborer la version des étudiants que de confirmer les propos du chef de l’Etat avec des chiffres.

Conformément aux dispositions constitutionnelles, une fois par an, le chef de l’Etat béninois adresse à l’Assemblée Nationale un message sur l’état de la Nation. Le 27 décembre 2018, le président Talon a sacrifié, pour la troisième fois depuis son entrée en fonction en avril 2016, à cette tradition. Mais ce message était le dernier que le chef de l’Etat va prononcer devant la 7ème législature du parlement en fin de mandat. C’est donc à un discours aux allures de bilan de mi-mandat que Patrice Talon a adressé aux représentants d’un peuple impatient des fruits de sa gouvernance.

Il était donc opportun pour Patrice Talon de rassurer les parlementaires et le peuple béninois de ses engagements profonds pour un Bénin meilleur. Toutes les actions engagées dans les différents secteurs étaient présentées aux députés. Dans le secteur de l’enseignement supérieur, le chef de l’Etat a rassuré de l’apurement des arriérés des allocations universitaires. « Dans l’enseignement supérieur public, (…) l’Etat a respecté ses engagements en procédant à l’apurement des arriérés d’allocations universitaires des années de 2015 à 2017, à hauteur de 15 milliards de francs cfa », avait déclaré le chef de l’Etat, Patrice Talon. Cette déclaration  a été aussitôt désavoué par les étudiants sur les réseaux sociaux.

Où est la vérité ?

Sur les réseaux sociaux, la déclaration du chef de l’exécutif devant les parlementaires a suscité la polémique toute la soirée du 27 décembre 2018. Les commentaires sont allés dans tous les sens. Pour situer l’opinion publique sur le sujet, une équipe de « Bénin Web Tv » a rencontré sur le campus d’Abomey-Calavi le 28 décembre Alain Nouho, président de l’Union nationale des étudiants du Bénin (UNEB). Selon lui, il y a encore plus de 1.200 étudiants allocataires des promotions 2015, 2016 et 2017 qui sont restés impayés. « Je ne sais sur quelle statistique le chef de l’Etat s’est basé pour dire que les arriérées allocations de 2015 à 2017 sont déjà apurés », a-t-il ironisé.

Il sera soutenu par Habib Ahandessi, président d’honneur de l’ONG « La voix des étudiants », qui affirme qu’à peine la moitié des étudiants allocataires des universités du Bénin est en possession de ses allocations universitaires. « Il y a une contradiction entre ce que le président de la République dit et les statistiques disponibles au niveau de la DBSU ou du Trésor public. J’ai entendu le directeur de la DBSU dit sur les ondes de la radio Univers (la radio universitaire – ndlr) qu’ils sont en train d’atteindre, dans le paiement, la moitié des étudiants allocataires. Où est alors la vérité ? », s’est-il interrogé.

[su_heading size= »17″]A Lire aussi : Allocations universitaires : la DBSU et le Trésor public dans le collimateur des étudiants[/su_heading]

Joint au téléphone le 05 janvier 2019, le Directeur général de la DBSU, Maxime Moïse Agbodandé, a indiqué que les responsables étudiants n’ont ni habilité, ni habileté à avoir des statistiques sur les dossiers d’allocations universitaires. « C’est un faux problème, ils (les responsables étudiants – ndlr) n’ont aucune statistique (…) Au moment opportun nous allons en parler. Laissez-moi aborder l’année 2019 avec beaucoup de sérénité et la sérénité pour moi à la DBSU, c’est comment faire pour que les étudiants, dans un futur très très proches, commencent par constater l’effectivité de leurs allocations. Je préfère l’action au discours », a-t-il assené sans donner la moindre statistique.

Le discours d’Etat face à la réalité du terrain…

En août 2018, sur la chaîne de télévision privée Canal 3, le Directeur général de la DBSU, Maxime Moïse Agbodandé, a indiqué que le retard noté dans le paiement des allocations universitaires est conjoncturel et se justifie entre autres par les mouvements de grèves des étudiants. Dans l’entretien téléphonique qu’il a eu avec l’équipe de « Bénin Web Tv » le 05 janvier 2019, il a également souligné des cas de défaut de dossiers et dénoncé l’incapacité des responsables étudiants à aider la DBSU à faire évoluer le processus de paiement des allocations.

« On a invité trois fois, sans suite, les étudiants de l’ex-FLASH pour faire des compléments de dossier. Une quatrième fois, j’ai associé la FNEB et l’UNSEB, ils n’ont pas pu nous aider à mobiliser les étudiants », a-t-il expliqué. Des explications qui ne semblent pas être conformes à la réalité. Des témoignes recueillis par l’équipe de « Bénin Web Tv » auprès de plusieurs étudiants, les organisations estudiantines notamment l’UNEB auraient joué un rôle déterminant dans le processus de traitement des dossiers des allocataires retardataires. « L’UNEB a même mobilisé des étudiants bénévoles pour aider la DBSU dans tout le processus », nous a-t-on confié.

[su_heading size= »17″]A Lire aussi : Benin: The Hunger Project s’engage dans l’émancipation des jeunes volontaires de l’UAC[/su_heading]

Sur le volet du « complément de dossiers », les étudiants que nous avons pu joindre n’étaient pas en phase avec les explications du Directeur général de la DBSU. Nourou-Dine Bani Mer Kati est étudiant en géographie et allocataire de la promotion 2015-2016. Jusqu’à la date où nous mettons en ligne cet article, il n’a pas encore reçu, à l’instar de plusieurs d’autres étudiants (des milliers selon les responsables étudiants), son allocation universitaire bien que, après plusieurs périples, il a déposé et redéposé son dossier à la DBSU.

« J’ai déposé mon dossier à la DBSU en 2015. Quand ils ont affiché les listes, mon nom ne figure nulle part, ni dans la liste des étudiants retenus, ni dans la liste de rejets. Malheureusement ou heureusement, l’année universitaire a été invalidée. En 2016, on nous a demandé de redéposé les dossiers, ce que j’ai fait. Mais jusqu’à présent, mon nom n’a pas été programmé et mon dossier est

resté introuvable. Je suis même découragé », a-t-il raconté. Saturnin Dohou, étudiant en Allemand et allocataire de la même promotion que Nourou-Dine Bani Mer Kati a vécu une situation pareille. Il n’a toujours pas encore touché son allocation universitaire.

A l’école normale supérieure, six étudiants de la promotion 2016-2017 sont toujours dans l’attente du paiement de leurs allocations universitaires. Pour Augustin Akro Gbagou, l’un d’entre eux , leurs dossiers sont toujours en souffrances à la DBSU bien qu’il leur a été demandé de les reconstituer avec le procès-verbal des notes de l’école normale. « Nos dossiers avait été rejetés au motif de moyenne non retrouvée. Avec la reconstitution des dossiers avec le procès-verbal, nous espérons avoir gain de cause mais nous attendons toujours », a-t-il expliqué.

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