Venezuela: une crise d’intérêts entre les puissances ?

Depuis 2014, le Venezuela connait une crise qui fait plus d’une centaine de mort et des milliers de déplacés. La crise se prolonge car le mercredi 22 janvier dernier, l’opposant Juan Guaido, renvoyé du poste de président de l’Assemblée nationale vénézuélienne sur décision de la Cour suprême, s’est autoproclamé «Président en exercice» du pays et a prêté serment pendant une manifestation à Caracas. La Russie, la Chine et la Turquie ont affiché leur soutien au président « légitime » Maduro, s’opposant aux Etats-Unis et à un nombre croissant de pays occidentaux qui se sont ralliés à l’opposant Juan Guaido.

La guerre des intérêts va aggraver cette crise. En effet, c’est déjà après la mort de l’ancien président Hugo Chavez en 2013, que le Venezuela ; détenteur de la plus  importante réserve de pétrole au monde, fait face à une crise aiguë et incessante. A cette crise politique au départ, s’ajoute une crise économique. Jadis, pays le plus riche de l’Amérique du Sud, le Venezuela a connu ces dernières années, une chute drastique de son économie. Au cours des quatre dernières années, le Produit intérieur brut (PIB) du Venezuela s’est effondré de près de 40%, dans un contexte de pénurie qui n’affecte pas que les entreprises par l’absence d’intrants, de matières premières, de biens de capital importés, mais la population dans son ensemble qui consacre une bonne partie de son temps à chercher des biens nécessaires à sa survie.

A cela s’ajoute, la chute des revenus pétroliers, principale ressource de ce pays et l’hyperinflation provoquant de sévères pénuries alimentaires et de médicaments et l’exode de plus de 4 millions de Vénézuéliens. Ses convulsions, suivies de l’autoproclamation de l’opposant Juan Guaido, «Président en exercice» ont fait monter, le niveau de la crise, très haut, avec des tensions diplomatiques, notamment entre la Russie qui soutient Nicolas Maduro et les Etats-Unis qui reconnaissent Juan Guaido en tant que président « légitime ». Cependant, on se demande pourquoi ses deux supers puissances s’intéressent autant au Venezuela ?

Crise des intérêts…

Au delà de toute qualification : politique, économique, sociale voire diplomatique, la crise au Venezuela est avant tout, une crise des intérêts. Les Etats-Unis, la Russie, la Chine et les pays européens tout comme la Turquie et bien d’autres, militent avant tout pour leur intérêt.

Le pétrole vénézuélien passionne les USA

Penser que les intérêts américains au Venezuela sont purement humanitaires n’est pas stupide, mais c’est ignorer aveuglément des décennies d’interventionnisme américain dans ce pays latino-américain qui serait stupide. En effet, on observe l’ingérence de chaque président américain au Venezuela depuis George W. Bush, et la volonté farouche des États-Unis de renverser Hugo Chavez durant toute une décennie et aujourd’hui encore les Etats-unis notamment Trump essaie de renverser Maduro en soulevant contre lui Juan.

Selon le site réseauinternational.net qui cite l’ancien membre du Parlement britannique George Galloway : « avant de lâcher les bombes, ils (les USA) lâchent d’abord le récit, bien sûr. Et le bombardement de la désinformation au Venezuela a été l’un des plus longs bombardements de l’histoire. D’énormes sommes d’argent américain ont été dépensées pour la falsification médiatique, la subversion, le sabotage, les coups d’État militaires et les menaces d’invasion tout au long de l’ère Chavez-Maduro. »

Récemment, Nicolas Maduro a estimé que les États-Unis avaient essayé d’organiser un coup d’État au Venezuela et a rompu les relations diplomatiques avec ce pays le 23 janvier. M.Maduro avait qualifié M.Guaido qui s’était autoproclamé président et que les Etats-Unis soutiennent, de Président non constitutionnel. Maduro avait donné un ultimatum de 24h pour que les américains quittent leur sol, la riposte américaine ne s’est pas fait attendre. Les USA ont fait une mise en garde à Nicolas Maduro et ne comptent pas quitter le territoire ; s’opposant ainsi à l’ultimatum de 24h donné par le président Maduro. De même, ils ont appelé l’armée vénézuélienne à soutenir Juan Guardio.

La passion des États-Unis pour le Venezuela dure depuis longtemps. On se demande pourquoi les USA s’intéressent autant au Venezuela ?

La raison est en priorité axée sur le pétrole vénézuélien qui attire les Etats-Unis, l’un des plus grands consommateurs de pétrole au monde. Pour ceux qui ne le savent peut-être pas, les réserves prouvées de pétrole du Venezuela sont connues pour être les plus importantes au monde, totalisant 297 milliards de barils. Les Etats-Unis géographiquement proches de ce pays, ont voulu depuis des décennies exploiter cette ressource en vain. Une chose qui n’est visiblement pas du goût de la maison Blanche qui d’une manière ou d’une autre s’ingère dans les affaires du Venezuela; soutenant notamment l’opposant Juan Gardio, quitte à signer des accords économiques avec ce dernier après avoir évincé le chef de l’Etat actuel. Il faut également souligner les sanctions américaines qui pèsent lourdes sur le Venezuela rendant la situation ingérable à Nicolas Maduro.

L’ONU dénonce une violation du droit international

Le 28 janvier, un expert des droits de l’homme des Nations unies avait dénoncé les sanctions américaines contre le pétrole vénézuélien affirmant qu’elles aggraveraient une grave crise humanitaire. «La contrainte, qu’elle soit militaire ou économique, ne doit jamais être invoquée pour obtenir un changement de gouvernement dans un Etat souverain», a déclaré Idriss Jazairy, rapporteur spécial des Nations unies chargé d’étudier l’impact négatif des sanctions, dans un communiqué publié à Genève. Il ajoute que «l’utilisation de sanctions par des puissances extérieures pour renverser un gouvernement élu constitue une violation de toutes les normes du droit international».

La Russie panique…

La Russie est un allié politique majeur du Venezuela. Au départ, une relation axée sur les Kalachnikovs et pétrodollars, la Russie a investi plus de cinq milliards de dollars dans le secteur de la production de pétrole vénézuélien et un milliard de dollars supplémentaires dans les mines et principalement pour l’or. En décembre, Caracas a donné le feu vert à la Russie pour commencer à extraire de l’or dans son pays. Pour la Russie, les enjeux sont cruciaux : si le président vénézuélien doit passer la main, elle risque de perdre un partenariat noué sous Hugo Chavez (1999-2013). Depuis, la Russie est également devenue le deuxième créancier du Venezuela derrière la Chine.

La Russie « risque que toutes ces relations cultivées pendant longtemps se retrouvent sans valeur », a déclaré à l’AFP Nikolaï Petrov, un professeur à la Haute école d’Economie de Moscou. Si Maduro tombe, « les risques de perdre nos investissements augmenteront sérieusement », avertit Dmitri Rozental, un spécialiste du Venezuela à l’Académie des sciences de Russie. Dans le domaine des hydrocarbures, la Russie a investi des milliards de dollars notamment par le biais de sa compagnie pétrolière semi-publique Rosneft, dirigée par l’influent Igor Setchine, un proche de Vladimir Poutine, qui multiplie les visites à Caracas.

Rosneft participe à plusieurs projets d’exploration et de production pétrolière et gazière au Venezuela en partenariat avec le groupe pétrolier vénézuélien PDVSA, désormais sanctionné par Washington. Une partie de la dette vénézuélienne à hauteur de plusieurs milliards de dollars envers Moscou est remboursée en hydrocarbures par des accords entre PDVSA et Rosneft.

On comprend donc pourquoi Moscow met tout son poids dans la bataille pour contrer la tentative de «coup d’État à Caracas» parrainée par Washington depuis le début de la crise, le 21 janvier, selon la vision qu’a le Kremlin du bras de fer opposant son protégé Nicolas Maduro à Juan Guaido, un «homme sorti de la rue», comme l’a qualifié le président de la Douma, Viatcheslav Volodine. Avec son allié chinois, le gouvernement russe a tenté de mettre en échec, samedi, un débat au Conseil de sécurité de l’ONU, dénonçant «l’ingérence» des capitales occidentales dans les «affaires internes du Venezuela». Selon l’agence Reuters, au moins plusieurs dizaines de mercenaires liés au groupe Wagner, lui-même proche du ministère de la Défense, auraient atterri ces derniers jours à Caracas en provenance de La Havane, afin d’assurer la sécurité du président Maduro. La Russie a également dénoncé les sanctions des Etats-Unis contre Venezuela, tout en estimant qu’une intervention armée des USA au Venezuela serait catastrophique.

 

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