Marchés publics: pourquoi la surfacturation est nuisible à l’Etat

C’est un secret de polichinelle que l’univers des marchés publics est gangrené par plusieurs pratiques préjudiciables à l’assainissement de l’économie nationale. La surfacturation, les pots de vin et autres pratiques constituent les maux qui minent le secteur.

Bénéficier d’un marché public n’est pas chose aisée avec tout le cortège de contraintes. Le prestataire, généralement, est soumis à plusieurs pratiques  qu’il se voit contraint d’honorer s’il tient à gagner le marché. Les personnes intervenants dans la chaîne, chacun à son niveau exige une retro commission d’où la surfacturation. Mais elle présente plusieurs désavantages pour l’économie du pays. Au Bénin comme dans plusieurs pays, la pratique résiste aux gouvernants comme l’hydre de lerne. Des marchés gré à gré sont finalisés en l’absence de toute orthodoxie financière. Il y a quelques mois, Jean-Baptiste Elias, président de l’Autorité nationale de lutte contre la corruption (ANLC) avait révélé une surfacturation sur l’achat de 84 motos au ministère du cadre de vie et du développement durable. Même si le dossier a été classé sans suite, l’ANLC disait vouloir faire gagner à l’Etat 300.000.000 Fcfa. Les cas sont légions et couverts malheureusement par nos cadres qui sacrifient l’Etat sur l’autel de leurs intérêts. L’administration croupit ainsi sous le poids de la corruption et ses corollaires.

A travers sa page ‘’Economie pour tous’’, Guillaume Liby, banquier, Directeur des investissements de GroFin Côte d’Ivoire donne 12 étapes pour comprendre pourquoi la surfacturation est nuisible à l’économie nationale :

  1. La surfacturation consiste à acheter un bien au-dessus de son prix de marché. Par exemple une route qui coûte 10 000 le km est acheté à 500 000 le km. Cette route est financée par un prêt ;
    Le bénéficiaire du contrat de construction de la route de connivence avec les commissionnaires du projet fait la facture pour 500 000. Il perçoit 100 000 et reverse 400 000 à ces derniers (rétro-commissions) ;
    3. Pour rendre ce scénario possible, le prestataire est choisi et non sélectionné (gré à gré) ;
    4. Pour profiter du laxisme des commissionnaires du projet, le constructeur cherchera à réduire son coût de revient bien en deçà du prix de vente réel de 100 000.
    5. Il prendra donc des matériaux de peu de qualité pour sortir un coût de revient autour de 50 000. Sa marge sera alors de 50 000 puisque la facture réelle est de 100 000.
    6. Les commissionnaires du projet qui se partagent les 400 000 de surfacturation, vont investir immédiatement pour éliminer la traçabilité des fonds et s’en décharger ;
    7. Par conséquent, ils vont investir dans des secteurs immédiatement à leur disposition, notamment achat ou construction de bâtiments, achat de terrains, de voitures, autres objets de luxe, bref des secteurs ayant très peu d’impact sur l’économie nationale ;
    8. Le gouvernement qui a contracté ce projet va devoir rembourser 500 000 pour un projet qui a coûté 100 000 ;
    9. Le service de la dette (remboursement du capital plus les intérêts) d’un prêt de 500 000 est bien plus élevé qu’un prêt de 100 000 ;
    10. Le gouvernement va donc augmenter les taxes et autres sources de revenus publics pour faire face à ce remboursement ;
    11. Ce harcèlement fiscal va contracter l’économie nationale puisque le revenu disponible (revenu après paiement des impôts) des ménages et des entreprises est réduit au profit de l’enrichissement illicite de quelque uns qui ont investi dans des secteurs non rentables pour l’économie nationale ;
    12. Ceci entraîne la baisse des embauches, la hausse des licenciements et de la pauvreté, la baisse des investissements dans la santé et l’éducation, etc.

Nos dirigeants à divers niveaux doivent alors évaluer les effets et prendre des mesures hardies.

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