Bénin – Adrien Houngbédji: des deux télécommandes au sursaut patriotique!

Me Adrien Houngbédji n’a pas encore fini d’écrire son histoire politique. De jour en jour, il adopte des positions parfois mal comprises ou mal interprétées. Cependant, il ne se fie pas à ses seules convictions pour prendre telle ou telle autre décision. Il tient à écouter « sa base » en toutes circonstances. Ce qui lui permet, à bien des égards, de paraître mystérieux.

Alors qu’il prononçait son discours d’investiture le 15 juin 2015 au sein de l’Hémicycle à Porto-Novo, le président du parti arc-en-ciel a répondu à une accusation de façon très allégorique. Il est distillé au sein de l’opinion que des partis politiques du Bénin sont alimentépar des présumés bailleurs de fonds. Adrien Houngbédji, comme pour éclairer le peuple sur ce qu’il en est, a lâché: « ni l’une ni l’autre des télécommandes ne sont vertueuses ». Pour un bon moment, cette portion du discours  est restée  dans les esprits . Houngbédji était sur toutes les lèvres et chacun s’y est laissé aller. A tort ou à raison, les positions étaient tranchées.

Juste quelques mois plus tard, à l’ouverture de la deuxième session de la même année, le Hagbè national s’attaque à l’élection présidentielle de 2016. « Le 28 février 2016, les Béninois seront appelés aux urnes pour élire à bonne date et dans la transparence, je l’espère, un nouveau Président de la République. Cet événement auquel notre peuple est désormais accoutumé et attaché, a valeur de test », s’en doutait-il. « S’il est réussi, il constituera le couronnement de nos efforts à tous, et renforcera de surcroît notre position de leader en démocratie, quoi que cette position me paraisse aujourd’hui surévaluée », s’inquiétait-il.

Dans le même registre, la deuxième personnalité du pays lance aux leaders politiques et autres acteurs: « la consolidation et la pérennisation de notre processus démocratique, exigent de tous les acteurs politiques, de la société civile et des leaders d’opinion, des comportements qui préservent la paix, la concorde et la cohésion nationale ». Adrien Houngbédji est, peut-on se permettre de dire, un homme attaché aux valeurs démocratiques.

Des réformes politiques…

Cet attachement à la vitalité de la démocratie le conduira à annoncer les réformes politiques profondes à l’entame de sa mandature. Lesquelles réformes rencontreront, neuf mois plus tard, l’assentiment de Patrice Talon. Main dans la main, les deux institutions ont conduit le processus à terme. La charte des partis politiques et le code électoral empreints de contraintes sont votés et promulgués. La polémique va s’installer autour de ces lois qui appellent à de nouvelles pratiques. Dans la foulée, Adrien Houngbédji, membre influent du Bloc de la majorité parlementaire, a encouragé le gouvernement à poursuivre les réformes en empruntant la porte de non retour.

L’ambiance au parlement

L’ambiance qui a prévalu au sein de l’Hémicycle est parfois et très souvent teintée d’incompréhension et soupçon. Alors que certains députés de la mouvance ont la latitude de se vider, le président de l’institution encadre avec fermeté les prises de paroles de certains élus de la minorité parlementaire. Mais très tôt, il s’est racheté. Le jeudi 11 février 2018, lors de la présentation des voeux à l’Assemblée nationale, Adrien Houngbédji a tenté de justifier l’incident d’avec l’honorable Guy Mitokpè. « Il n’est pas question de penser que j’ai fait obstruction à une intervention mais plutôt de voir et de reconnaître mon sens d’anticipation sur les conséquences d’une dérive au sein de l’hémicycle », se justifie-t-il.

Le Prd et le Bloc républicain

Le parti de cœur et de raison des populations de l’Ouémé et du Plateau, du moins jusqu’à un passé récent, le parti du renouveau démocratique, devrait être membre du Bloc républicain. Cette volonté des ténors de la formation politique qui a pourtant traversé des âges a fait couler d’encre et de salive. Très tôt Adrien Houngbédji s’est ravisé et a éclairé l’opinion sur le volte-face de son mouvement politique. « ...Sous la pression amicale du chef de l’Etat; le Prd a accepté de fusionner avec Dynamique Unitaire (aujourd’hui Bloc républicain) dans le souci de l’unité nationale », pouvait-on lire dans le communiqué. Le Prd s’est empressé de faire les formalités avant d’être recalé par la commission électorale nationale autonome pour cause de doublon sur sa liste de candidature.

La tenue des élections avec deux partis aux allures mouvancières

Adrien Houngbédji n’était pas d’accord pour la tenue des élections exclusives. . En témoigne le ballet de ses émissaires à la cour constitutionnelle pour faire invalider les deux partis mouvanciers en lice. Dans la même veine, le 6 mars, il accepte avec joie la mission de la recherche du consensus au sein de la classe politique. Même si la mission a échoué, Adrien Houngbédji continuait d’inspirer confiance jusqu’à la rencontre des présidents d’institution. Après la lecture du communiqué ayant sanctionné cette rencontre que d’aucuns qualifient « d’anticonstitutionnelle », la parole de Me Houngbédji était réclamée par plus d’un.

Que retenir enfin?

Les élections auront lieu sans le parti de Me Adrien Houngbédji et ceux de l’opposition. Il a choisi un moment solennel, comme il en a l’habitude, pour situer ses compatriotes sur sa position quant au processus électoral en cours. « Si, en ma qualité de Président de l’Assemblée Nationale, il est de mon devoir d’accompagner notre institution vers des élections législatives dans le respect des lois, il est aussi de mon devoir de me placer au-dessus de tout calcul ou posture politique, envers et contre toutes les rigidités politiciennes.
Mon seul et unique agenda, est d’assurer les fonctions républicaines que me confèrent la Constitution et les lois, de contribuer à préserver l’aura et la qualité de notre démocratie et d’œuvrer pour la paix », se tente-t-il de se justifier. Il semble avoir écouté le cri de coeur du bas peuple et tente de se racheter en lançant sans outre mesure « Le peuple béninois exige que nous préservions la vitalité de sa démocratie, et que nous protégions les droits et les libertés chèrement conquis. Notre peuple veut que nos élections législatives, soient inclusives, c’est-à-dire ouvertes à tous, apaisées, et qu’elles soient libres et transparentes. Il est de mon devoir d’accompagner notre institution vers la réalisation de cette légitime ambition de notre Peuple ».

Une interrogation simpliste à la limite triviale préoccupe tout de même: le président Houngbédji se serait-il autant  engagé pour une inclusivité des législatives prochaines si son projet de fusion dans le Bloc républicain avait prospéré? Difficile de répondre.

 

 

Les commentaires sont fermés.

Ce site Web utilise des cookies pour améliorer votre expérience. Nous supposerons que vous êtes d'accord avec cela, mais vous pouvez vous désinscrire si vous le souhaitez. Accepter En savoir plus