Bénin: Laurent Mètongnon et ses co-accusés seront probablement fixés demain

Le procès de l’ex-président du Conseil d’Administration de la Caisse nationale de sécurité sociale (CNSS), Laurent Mètongnon et ses co-accusés reprendra demain Jeudi 4 Avril 2019. A la suite des dépositions des différents mis en cause lors du dernier procès, le juge pourrait situer les différentes parties dans ce procès.

Renvoyé au Jeudi 4 Avril lors de l’audience du 21 mars dernier, l’ancien président du conseil d’administration de la caisse nationale de sécurité sociale, Laurent Mètongnon et ses co-accusés dans le dossier de perception de rétro-commission seront à nouveau devant le juge de la cour de répression des infractions économiques et du terrorisme (criet). Au cours de la dernière audience, les différents mis en cause sont tous montés à la barre pour faire des dépositions. Nous vous proposons de revenir sur les derniers développement de cette actualité.

Point du procès du 21 Mars 2019: 

Au cours de la sixième comparution des présumés coupables du dossier Cnss ce jeudi 21 mars dernier devant la cour de répression des infractions économiques et du terrorisme, le DG de la Bibe qui est censé avoir distribué les rétro-commissions affirme n’avoir jamais donné à la BEF ni à la Commission bancaire de l’UEMOA les noms de Mètongnon, Youssao, Adégoké, Ahonon et autres.

Invité à la barre, Ahonon dit connaître Boko Romain depuis longtemps pour avoir aussi travaillé dans certaines banques de la place. Après avoir démontré que la BIBE n’était nullement en faillite au moment du placement des DAT, il affirme, pour avoir été DAF (Directeur des Affaires Financières) dans plusieurs banques, qu’aucun texte n’autorise les DG de banque à donner de l’argent à quelqu’un après placement de DAT. Mieux, l’article 6 de la Convention Collective des banques sous le couvert duquel se met Boko Romain est mal interprété, dit-il, ayant été lui-même signataire de ladite convention. Du reste, les dons et libéralités existent dans les banques sous forme d’étrennes (il dispose des factures d’entreprises ayant produit des étrennes en vue de justifier les dépenses) ; ce qui n’est pas le cas dans le cas d’espèces. Il continue en disant que Boko Romain le connait bien, connait sa rigueur et sait qu’il ne lui a jamais remis de l’argent en tant que DG/CNSS. Boko seul pourra dire ce qu’il a fait des fonds décaissés au nom de la CNSS. Il pourra peut-être le dire en aparté à la Cour, conclura-t-il.

La déclaration de Mora Jérémie à la barre:

A la suite du sieur Ahonon, le Directeur Financier de la CNSS, Mora Jérémie déclare à la barre que dans ses attributions, il lui revient de déclencher la procédure conduisant aux DAT lorsque le niveau des recettes le permette. Les recommandations de l’IGE (Inspection Générale de l’Etat) exigent que la CNSS ne doit pas laisser séjourner les fonds dans des comptes courants faiblement ou pas du tout rémunérés. Il dit connaître Gnanguènon, le Chef d’agence de la BIBE/Jéricho, gestionnaire du compte de la CNSS à la BIBE, mais que ce dernier ne lui a jamais parlé de rétro-commissions octroyées aux dirigeants de la CNSS ou aux membres du Conseil d’Administration avant ou après le placement des DAT.

La déclaration de Saliou Youssao à la barre:

A la barre, Monsieur Saliou Youssao, déclare avoir vu Boko Romain pour la première fois le 23 Novembre 2017 dans le bureau du Procureur de la République. Il dit m’avoir envoyé des rétro-commissions par le biais de Edouard Adégoké, fonds que je n’ai jamais reçus. A la question de savoir combien il m’aurait envoyé, il regarde en haut et en bas et déclare 2.500.000F, montant qui aura évolué entre temps pour se s’élever à 4.000.000F CFA dans la décision de condamnation. A la question du ministère public de savoir l’intérêt que Boko a à mentir sur son compte, Youssao répond que Boko peut ne pas avoir un intérêt personnel à mentir sur son compte ; mais qu’une tierce personne peut avoir intérêt à ce qu’il mente ; il préfère ne pas aller dans ce domaine et s’en tient au fait. Se basant sur les rapports de la Commission bancaire de l’UEMOA et de l’IGF, il relève les raisons qui peuvent amener le DG Boko Romain à mentir. Ces raisons sont regroupées en 12 points, les unes beaucoup plus techniques que les autres. Il a cité entre autres :

Le Produit net bancaire (PNB). L’analyse du PNB faite par la commission bancaire fait état de ce que les produits d’exploitation bancaire ont augmenté de 28% contre une hausse des charges à concurrence de 40%, induisant ainsi une faible progression du PNB. Cette faiblesse du PNB est due au coût élevé de mobilisation des ressources. De plus, l’analyse des charges de gestion montre une hausse de ces charges. L’augmentation de ces charges est liée à la hausse de la prime de stage et des frais de mobilité de personnel.

Pour avoir été Directeur de l’Exécution du Budget de l’Etat, il affirme que l’exécution d’une dépense repose sur deux critères. La preuve et la couverture. Dans le cas d’espèce, Boko Romain a l’autorisation de son Conseil d’Administration d’exécuter la dépense sans pour autant avoir la preuve que la dépense ait été effectuée.

Boko Romain avait dit qu’il remet les commissions après les DAT. Le 1er DAT a eu lieu en Septembre 2014. Or, le rapport de l’IGF fait état de ce que, entre Avril et Juin 2014, une commission de plus d’un million a été décaissée au nom de la CNSS.

Boko Romain, faisant le point des dépôts, a relevé un accroissement de 32 milliards en 2013 à 55 milliards en 2016, soit une augmentation d’environ 23 milliards. Le rapport de la commission bancaire a relevé un coût de mobilisation des ressources à hauteur de 471 millions sur la même période. Or, des 23 milliards, la CNSS a fait des DAT de 16 milliards pour un supposé coût de mobilisation de 71 millions. Où sont alors passés les 400 millions restants ?

En somme, Youssao a essayé de démontrer à la Cour que Boko mentait depuis le début de cette histoire pour tenter de couvrir le gap observé dans sa gestion. Il a même rappelé à la Cour que Boko Romain, en 1ère instance, avait dit  que c’est à la BEF qu’on lui aurait remis la liste des noms de tous les accusés ici présents.

Déposition de Boko Romain à la barre:

A la barre, Boko Romain confirme qu’il n’avait jamais vu Youssao avant l’éclatement de cette affaire CNSS/BIBE. Il déclare avoir entendu parler de cette affaire pour la 1ère fois en écoutant Mètongnon faire une déclaration à la radio. Il dit être à Covè dans son village natal quand il a été convoqué à la BEF le 16 Novembre 2017. Il confirme avoir été écouté les 16 et 17 Novembre 2017 et qu’il n’a jamais cité les noms de ceux qui sont ici présents. Il dit n’avoir cité le nom de personne, ni à la BEF, ni devant la Commission bancaire de l’UEMOA à Abidjan. A la question du président de la Cour de savoir comment alors on a ces noms aujourd’hui, Boko Romain restera bouche bée. Néanmoins, il poursuivra en disant que Mètongnon était déjà accusé de corruption alors qu’il n’a pas cité son nom et bien avant même qu’il soit convoqué à la BEF.

Cette version de Boko Romain est contraire à toutes ses déclarations depuis le début de ce procès. Le président de la Cour appelle à nouveau Mètongnon à la barre. Ce dernier dit : « Monsieur le président, c’est vrai ; j’ai, sur radio Soleil FM, dans l’émission Sans langue de bois, été invité parce que je faisais l’objet d’un lynchage médiatique depuis Juin 2017 au plan national et international. Même des meetings étaient organisés par les thuriféraires du pouvoir pour m’humilier (Béhanzin Frédéric et sa bande à Agla par exemple), me demandant de me rendre à la justice. Tout cela aura été confirmé par le Conseil des ministres du 02 Novembre 2017, qui, dans son communiqué dit que j’ai fait des placements dans une banque en faillite, en difficulté dans le seul intérêt inavoué de bénéficier des contre parties en commissions occultes. La presse avance un montant de plus de 400 millions, puis après de 71 millions. C’est pourquoi, Monsieur le président, je ne puis m’empêcher de faire la genèse de ce dossier ».

Poursuivant toujours dans sa réponse, il dit « Monsieur le président, j’ai été convoqué à la BEF le 17 Novembre 2017. Toutes mes tentatives pour expliquer que la banque n’était pas en faillite ni en difficulté au moment des placements ont été vaines. Mais, j’ai quand même versé les pièces au dossier que vous avez. Le conseil d’administration juge sur pièce et un compte rendu est fait au ministre de tutelle après les sessions. Le conseil d’administration n’a jamais eu connaissance d’une décision de justice déclarant la BIBE en faillite et liquidée ». ajoute-t-il.

A la question du président de la Cour de savoir à quel moment il a vu Boko Romain pour la 1ère fois, Mètongnon répond « le 17 Novembre 2017 à la BEF, à la confrontation au cours de laquelle Boko dit m’avoir remis 2.500.000F CFA en tranches plus un pack de champagne évalué à 130.000F CFA. Mr Boko, qui vient de déclarer n’avoir donné aucun nom à la BEF ni devant la commission bancaire de l’UEMOA, avait bel et bien un papier en main et avec précision, donnait la date de l’envoi de chaque tranche ». A la question de savoir ce qu’on a retrouvé chez Mètongnon lors de la perquisition, il répond « chez moi, ils n’ont rien trouvé, ils ont pris mes titres de propriété, mais qui m’ont été retournés après. Monsieur le président, mon compte bancaire sur lequel est viré ma pension de retraite est bloqué depuis le 23 Novembre 2017 ».

– Le second témoin à charge ou à décharge contre Adégoké, Amoussou Guillaume, chauffeur de Boko Romain au moment des faits ne s’étant pas présenté, l’audience est alors reportée et reprendra demain Jeudi 04 Avril 2019.

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