Bénin: Boni Yayi, le cauchemar du pouvoir de Patrice Talon?

Les derniers événements convergent vers des conclusions qui sont probablement une évidence de ce que le parti Force cauris pour un Bénin émergent et son président d’honneur constituent un os dans la gorge du régime de la rupture.

Depuis les dernières élections législatives, la tension est montée d’un cran entre les formations politiques soutenant les actions du chef de l’Etat et celles de l’opposition. La véritable pomme de discorde reste l’exclusion des partis non seulement de l’opposition mais aussi ceux satellites de la course au parlement. Les violences ont eu lieu par endroit dans le pays. L’ancien chef d’Etat Boni Yayi est poursuivi pour son implication supposée dans les manifestations des 1er et 2 mai à Cotonou, selon le procureur de la République, Mario Mètonou. C’était en juin dernier. Le juge du 4è cabinet a tenté par deux fois d’écouter le président d’honneur des Fcbe en vain.

Après quelques jours, deux mois environ en résidence surveillée, Boni Yayi a dû quitter le pays pour se faire soigner, après l’intervention de certains chefs d’Etat de la sous-région. Depuis lors, l’atmosphère restait invivable. Les diatribes vont bon train par médias interposés. Patrice Talon a annoncé, pour apaiser les cœurs, un dialogue. Dans la foulée, outre le parti de l’opposition modérée, toutes les autres formations chantent et dansent au son du nouveau départ. Un dialogue dans ce contexte n’aura certainement aucun effet. Il faut alors crédibiliser les débats.

Récépissé au parti de Boni Yayi malgré la poursuite judiciaire

Si les dignitaires du Bénin révélé ont fredonné à temps et parfois à contre temps que les partis recalés n’avaient pas rempli les conditions imposées par les textes pour se faire délivrer le papier administratif, la version aura changé au lendemain des élections. Le ministre de l’intérieur, après une rencontre du chef de l’Etat avec les partis en difficulté, a demandé à ceux-ci de sacrifier leurs camarades ayant maille à partir avec la justice. C’est la condition sine quoi non pour se faire délivrer le sésame. Tous les partis ont opposé une fin de non recevoir à cette exigence. Pour enfoncer le clou, deux ministres du gouvernement, Sacca Lafia de l’intérieur et Maxime Quenum de la justice, ont signé un arrêté rendant tous ceux qui ont des démêlées avec la justice apatrides.

C’est dans ce contexte que le 12 septembre, une partie des Forces cauris pour un Bénin émergent (Fcbe) a tenu un congrès extraordinaire pour satisfaire partiellement aux exigences de Sacca Lafia. Certains membres fondateurs ont été bootés dehors à l’exception de Boni Yayi, pourtant poursuivi comme étant l’instigateur principal des violences post-électorales. Le dossier introduit au ministère de l’intérieur séance tenante. Le 17 septembre, moins d’une semaine après, le précieux certificat provisoire est déposé sur la table des demandeurs. D’aucuns ont beau crier à la politique du deux poids deux mesures, mais cela n’a pas empêché le ministre de délivrer le certificat définitif au parti qui a dirigé ce pays dix ans durant. La conséquence ne va pas se faire attendre.

La convocation du dialogue politique

Le timing est bien millimétré au point où certains observateurs se refusent à croire en une coïncidence de calendrier.  En effet, annoncé depuis le 20 mai, il a fallu l’obtention du récépissé des Fcbe pour que le dialogue soit convoqué cinq mois plus tard. Tout se passe comme si le chef de l’Etat n’attendait que le parti de Boni Yayi pour inviter la classe politique à s’asseoir autour d’une table. Et ça n’a pas raté. En dépit des divergences au sein du parti, divergences nées de l’obtention du récépissé, une aile du parti s’est fait représenter au dialogue du 10 au 12 octobre. Une foultitude de résolutions ont été prises pour un retour à la paix. Et là encore, Boni Yayi semble la cible.

Une loi d’amnistie pour les violences électorales

Le dialogue politique a sollicité du chef de l’Etat des mesures d’apaisement. Ces mesures établies en dix-huit points sont comme un appendice au rapport général. Patrice Talon s’en est attaqué au plus vite. Une loi d’amnistie est en vue pour abandonner les poursuites contres les commanditaires et auteurs des violences pré- et post-électorales. La question des exilés politiques ne préoccupe pas autant. D’ailleurs, le ministre de la communication qui refuse le titre de « porte-parole du gouvernement », quand bien même il joue le rôle à lui visiblement dévolu de façon officieuse, Alain Orounla, a encore insisté sur la télévision nationale le samedi dernier que le gouvernement n’a pas connaissance d’exilés politiques à ce jour. Ceux qui s’appellent exilés sont des gens qui ont des dossiers pendants devant la justice et qui s’y sont soustrait, fait-il remarquer.

S’Il est un secret de Polichinelle que plusieurs Béninois sont hors du territoire national et que certains d’entre eux ont déjà obtenu le titre d’exilé politique officiellement, il n’est pas exclu que le gouvernement fasse sa lecture de toutes les décisions prises ci et là. Qu’à cela ne tienne, au nombre des mesures d’apaisement, il y a bien évidemment le retour des citoyens qui vivent malgré eux hors du territoire national. Limiter les mesures d’apaisement aux violences électorales, c’est ni plus ni moins viser la personne de Boni Yayi. Même s’il faut reconnaître qu’au-delà de la personne de l’ancien chef d’Etat, une soixantaine de personnes croupissent en geôle depuis des mois.

L’appel téléphonique de Talon à Yayi

Récemment, du retour du Sénégal, le chef de l’Etat devrait rencontrer son prédécesseur au Niger le 4 octobre, rapporte la lettre du Continent. Mais Boni Yayi aurait décliné l’offre en posant des préalables. Alain Orounla a révélé sur la télévision nationale que le chef de l’Etat a téléphoné au président d’honneur des Fcbe pour qu’il rentre paisiblement au pays. Même si les partisans de Boni Yayi tentent de démentir l’information officielle, il n’en demeure pas moins que des choses se font pour le retour au bercail du Buffle de Tchaourou. Tous ces événements laissent croire que le patron des cauris est devenu une préoccupation majeure pour le régime en place au point où tout est pratiquement focalisé sur lui.

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