Bénin – Employabilité : L’univers des travailleurs indépendants

Le monde du travail constitue toujours la problématique non résolue par des dirigeants béninois. Afin d’éviter l’oisiveté et de subvenir à leurs besoins, des jeunes se lancent dans une nouvelle forme de catégorie professionnelle appelée « freelance ».

Les statistiques sur l’emploi des Béninois, surtout des jeunes, ne sont toujours pas reluisantes. Le cas n’est certes pas spécifique au Bénin, mais le taux de chômage et de sans-emplois dans le pays inquiète tant les dirigeants que le citoyen lambda. En 2018, l’Organisation internationale du travail (OIT) rapporte que le nombre de chômeurs dans le monde s’élève à près de 172 millions, soit un taux mondial de 5%. Au Bénin, ce taux de chômage avoisine 2,6% selon une étude récente.

Face donc à cette situation et au vue de la mise en application de la loi N°2017‐05 du         29 août 2017 portant embauche, placement       de main‐d’œuvre et résiliation du contrat de travail, des jeunes préfèrent s’investir autrement afin de subvenir à leurs besoins professionnels. D’aucuns les appellent les freelancers, mais l’OIT utilise le thème « travailleur indépendant » pour les désigner.

Le travailleur indépendant est une personne qui travaille pour son propre compte, qui n’a pas de salaire parce qu’elle ne dépend pas d’entreprises privées ou d’administrations publiques, qui travaille seule, sans collaborateurs salariés. L’expression « travailleur indépendant » s’appliquait plus aux artisans et petits propriétaires fonciers, à certains titulaires d’une profession libérale. C’était bien au milieu du 20ème siècle. Mais aujourd’hui, on retrouve des « travailleurs indépendants » dans presque tous les secteurs d’activité professionnelle.

Au Bénin, les freelances se sont faits distingués dans le journalisme. Ce n’est qu’après que les autres secteurs d’activité ont enregistré les travailleurs de cette catégorie. D’aucuns l’avaient vite fait de le confondre à la cybercriminalité ou arnaque sur internet surtout avec ceux qu’on appelle communément des « gaymen ». Mais en fait, c’est une profession libérale qui n’exige aucune signature d’un contrat conventionnel avec l’employeur.

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Romuald est journaliste de profession. Issu d’une école bien réputée dans la formation des journalistes au Bénin, diplômé depuis 2014, il travaille en freelance depuis 2016. Son passage dans un organe de presse audiovisuelle au Bénin n’étant pas concluant compte tenu du traitement salarial peu bénéfique, il avait décidé de mettre ses compétences aux services des entreprises de presse, mais en freelance. « J’ai démarré avec un magazine panafricain. J’ai traité un sujet sur la circulation routière au Bénin. Cette production m’a rapporté 120 euros, soit 78 600 francs CFA alors que l’article comporte environ 1 500 mots », relate Romuald qui ajoute que la décision de freelance est partie de cette collaboration. « Aujourd’hui, je collabore avec différents organes de presse et je me plais bien puisque je subviens à mes besoins. C’est bien mieux que d’être sous les ordres d’un employeur avec un contrat de travail parfois problématique », a-t-il soutenu.

Habib, quant à lui, est major de sa promotion en génie informatique. Programmeur et développeur web, il a préféré travailler en indépendant depuis deux (2) ans maintenant. Muni de son ordinateur et d’un accès à l’internet, Habib propose ses services sur les différents sites d’offres en ligne. Ne disposant pas de local devant faire office de bureau, il travaille depuis sa maison ou n’importe quel autre lieu. « J’ai conçu plusieurs sites internet, développé plusieurs applications pour des entreprises et même des particuliers, j’ai des demandes constantes et mes revenus tournent autour de 250 000 mille francs CFA, soit environ 381 euros le mois », a dévoilé Habib.

Dans le sixième rapport annuel publié en 2019 par Upwork et la Freelance Union, une association de travailleurs indépendants aux Etats-Unis, nombre d’Américains considère le freelance comme une carrière à long terme. A l’allure du contextualisation de ce concept de freelance au Bénin et à voir la courbe ascendante de la précarité de l’emploi dans le pays, les statistiques de ces travailleurs indépendants pourront bientôt grimper. L’apparition des technologies de l’information et de la communication a désormais mondialisé le travail et offre une gamme variée de services qu’on peut se procurer ou proposer  sur le net. Et c’est bien l’univers des travailleurs indépendants.

Ce phénomène n’est pas spécifique au Bénin puisque le Royaume-Uni, le Brésil, le Pakistan, l’Ukraine, les Philippines, l’Inde, le Bangladesh, la Russie, ou encore la Serbie sont classés en tête, sur le plan mondial, en matière de travail indépendant. Et cette croissance n’en est qu’à ses débuts si l’on se fie aux prévisions du Forum économique mondial, qui a indiqué dans son rapport « L’avenir de l’emploi 2018 » que les entreprises sont prêtes à engager des travailleurs d’une manière plus souple, en augmentant leur dépendance aux travailleurs indépendants.

De ce nouvel univers professionnel, on retrouve aussi bien les hommes que les femmes. Ces dernières soutiennent, à l’unanimité, que le travail indépendant leur permet de toujours assurer leur obligation conjugale au même temps qu’elles gagnent dans leur profession.

De l’endurance professionnelle

Etre un travailleur indépendant n’est systématiquement pas un paradis professionnel. Le travailleur indépendant est certes loin des exigences d’un employeur classique et conventionnel, mais est confronté à bien d’autres cas.

« Le phénomène de « gay man » au Bénin rend d’office plus problématique le travail indépendant », soutiennent à l’unanimité les travailleurs indépendants contactés. Pour Agathe, le taux de cybercriminalité enregistré au Bénin fait que les services qui viennent de nous qui sommes des travailleurs indépendants sont souvent considérés comme des techniques d’arnaque et d’escroquerie sur internet. « A plusieurs reprises, mes services ont été rejetés pour le seul motif de l’image que l’extérieur colle au Bénin. Mais nous travaillons aujourd’hui à restaurer cette image qui est loin de favoriser un travailleur indépendant dans le pays », a raconté Habib.

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Au-delà de ce phénomène qui n’est d’ailleurs pas propre au Bénin, les travailleurs indépendants vivent au quotidien et ne dispose d’aucun fond de garanties retraite. Une telle absence de garantie sociale dénote également de la précarité de ce travail. En attendant donc une meilleure politique de l’Etat dans ce secteur des travailleurs indépendants, ces derniers continuent leurs services  pour une adaptation adéquate au marché mondial de travail.

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