Bénin: l’Assemblée nationale ou l’antichambre de l’Exécutif?

Les députés de la huitième législature, bien avant leur installation, ont fait l’objet de toutes critiques. Émanant tous du camp présidentiel, il était plausible qu’ils rangent leur propre conviction pour exécuter les desiderata de l’Exécutif. Six mois après leur installation, les faits semblent confirmer les inquiétudes voire les récriminations des observateurs et autres forces de l’opposition.

Louis Gbèhounou Vlavonou et ses collègues sont en train d’écrire petitement des pages de leur histoire. Appartenant à un parlement totalement acquis à la cause du Président Patrice Talon, ils ne devraient, en temps normal, faire obstacle aux projet du gouvernement. Seulement, en six mois, l’élégance semble aux antipodes des pratiques qui s’érigent en règle désormais au sein de l’Hémicycle. En effet, la norme depuis l’installation de ce parlement que d’aucuns qualifient d’illégitime compte tenu de son caractère monolithique, reste l’étude et l’adoption des lois pendant que les Béninois se trouvent dans les bras de Morphée.

La loi fondamentale, bien que n’ayant pas fait l’objet de consensus, tel que le stipule une décision (sans recours) de la cour constitutionnelle, a été révisée à l’unanimité des députés présents et représentés. Personne n’a émis de réserve en votant « abstention » en dépit de sa foultitude d’incohérences que dénoncent en chœur au moins pour une fois, les constitutionnalistes . Non seulement les procédures n’ont pas été respectées (procédure d’urgence pour les lois ordinaires et non pour la constitution, selon Ibrahim Salami et Joël Aïvo se référant au règlement intérieur de l’Assemblée nationale) mais les dispositions crisogènes que le texte renferme sont aussi sujet à caution. La cour constitutionnelle, a validé la loi pour permettre au chef de l’Etat de la promulguer malgré ses professions de foi devant le fameux comité d’experts.

Le code électoral et ses révélations

C’est le processus ayant conduit à la promulgation de cette loi qui aura révélé le vrai visage de ce parlement. L’étude de la loi a commencé tard dans la nuit du mercredi 13 novembre à 21 heures 56 minutes. Les élus du peuple ont passé une nuit blanche pour adopter le texte le jeudi 14 autour de 8 heures. Mais, miraculeusement, la loi a été transmise au chef de l’Etat le 13 novembre, donc avant même son adoption. Peu avant 19 heures dans la journée du jeudi 14, les sept sages de la cour constitutionnelle se sont réunis en audience solennelle pour valider le document de plus de 200 articles. Il y a visiblement urgence. Le lendemain, le vendredi 15 novembre, le chef de l’Etat promulgue le code électoral. Certaines voix ont crié à une complicité dangereuse et suicidaire entre les trois institution. Alors que l’Assemblée nationale et la cour constitutionnelle sont, par essence, sont des institutions de contre pouvoir.

L’unanimité, l’autre arme de la huitième législature

Tous les projets de lois ou propositions de lois introduits au parlement depuis l’avènement de la huitième législature reçoivent l’approbation de 83 députés sur 83. Il n’y a et peut-être n’aura pas une seule loi à voter sans cette union sacrée autour du président Talon. Même dans une classe de 30 élèves, il y a différents sons de cloche. Tout a commencé le jour de leur installation. Deux partis politiques s’entendent parfaitement pour que l’élection du bureau se déroule à l’unanimité. A tous les postes, il n’y a pas eu de concurrent. Les candidats se connaissaient et les deux blocs ont suivi la consigne de leurs leaders respectifs.

Contrôle de l’action gouvernementale, le talon d’Achille du parlement

Sur plusieurs situations préoccupantes, le parlement n’a pas daigné interpeller le gouvernement, ne serait-ce pour camoufler la situation. Le premier rapport du président de l’institution à l’ouverture de la deuxième session ordinaire en dit long. Pas de question écrite ni orale. Certains élus, se sentant gênés, ont fustigé cette forme de fonctionnement qui transforme de facto le parlement en un prolongement du gouvernement. Louis Vlavonou, dans sa réponse, a été on ne peut plus clair: « si vous êtes prêts, je suis aussi prêt ». Cela résume tout sur la capacité du parlement à interpeller le gouvernement. Adrien Houngbédji, lors de l’université de vacances de son parti politique, a insisté sur la question, surtout en ce qui concerne la fermeture des frontières. Il demandait aux députés d’obliger le gouvernement à s’expliquer à propos. Mais peine perdue.

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