Terrorisme au Sahel : « la situation est hors de contrôle », experts

Alors que la terreur s’empare du Sahel et que les pays de la région semblent être dépassés par les événements, plusieurs experts pensent que la lutte contre le terrorisme dans le Sahel, telle que c’est fait actuellement, n’améliorerait pas les choses.

L’Agence France Presse (AFP) s’est penchée sur la question de la recrudescence des attaques liées au terrorisme au Sahel et a invité des experts à plancher et donner leur vision de la lutte actuelle que mènent les pays africains du Sahel contre les groupes djihadistes. Sur le cas du Niger, l’ancien analyste de la CIA et politologue à l’institut de recherche RAND, Michael Shurkin, indique que la situation « va très mal et cela va continuer d’empirer ». Il souligne que les soldats locaux ne sont pas assez nombreux et aussi qu’il leur manque « compétences et équipements ». Parlant de l’opération Barkhane, Shurkin  ajoute que « les Français ne sont pas assez nombreux non plus ».

Dans un autre cas, avec les différentes attaques terroristes au Mali, au Niger et au Burkina (les plus touchés), un responsable du département d’Etat américain sous couvert de l’anonymat, indique à l’AFP, qu’«il n’est pas possible de régler la situation en tuant tout le monde. La situation est hors de contrôle. Les Etats sont désorganisés, je pense qu’ils sont justes dépassés ». L’AFP rapporte que selon lui, au lieu de constituer une force efficace contre le terrorisme, le G5 Sahel ne demeure qu’une « idée ».  Pour Michael Shurkin, « tout le monde sait que Barkhane n’est pas assez important pour faire plus qu’éteindre un feu plus gros encore. C’est la pire des justifications pour une guerre, mais la France en est là ».

Plus de facilité de recrutement et progression rapide de Djihadistes

Pendant que la violence augmente dans la région avec de plus en plus d’attaques de bases militaires, Emily Estelle, de l’American Entreprise Institute (AEI), révèle que « les groupes progressent dans leur lecture des réalités locales et commencent à proposer des formes de gouvernance ». Elle ajoute que les groupes terroristes, « assouvissent des besoins simples de la population » en matière de politique gestion des droits d’exploitation des terres ou de l’usage de l’eau dans les villages. Ainsi, il leur est facile de recruter parmi la population. Aussi les violences exercées par les militaires entre arrestations de masse et exécutions sommaires d’individus accusés de soutenir les djihadistes, contribuent à faciliter la tâche aux insurgés dans le recrutement. Les groupes deviennent alors plus efficaces.

Le président français Emmanuel Macron a annoncé le report à janvier du sommet consacré à l’opération Barkhane et au G5-Sahel, initialement programmé le 16 décembre pour notamment clarifier avec les dirigeants africains les positions de chacun sur la présence militaire française. Selon les experts interrogés par l’AFP, ils ne voient pas la France rappeler ces soldats au risque d’un embrasement de la région. Aussi Macron ne se permettra pas d’augmenter son effectif militaire dans le Sahel même si, à l’étape actuelle, l’effectif actuel (4500 hommes), ne sert pas encore à pacifier le Sahel.

« Est-ce que le Togo, le Bénin, le Ghana sont préparés ? »

A travers les différentes situations rencontrées et observées par les experts, analystes et observateurs, il est à conclure qu’en réalité cette lutte contre le terrorisme au Sahel ne peut être menée et gagnée par un Etat. Il va sans dire que, même si les Etats mènent des efforts colossaux, le plus important c’est d’arriver à véritablement coaliser ces efforts et de le faire vraiment le plus tôt possible. En théorie c’est ce qui est fait ; cependant, sur le terrain, le constat est tout autre. Si cela continue ainsi, il n’y aura pas que le Sahel qui va s’inquiéter, les pays environnants aussi subiront l’assaut des islamistes.

« La France est autant déployée que possible et n’y arrive pas. Aucun Etat ne peut renflouer la région », estime Jacob Zenn, de la Fondation Jamestown à Washington, cité par l’AFP. Avec en tête plus de questions que de réponses. « Est-ce que l’arc d’instabilité (Niger, Burkina, Mali) va se concrétiser ? Est-ce que le Togo, le Bénin, le Ghana sont préparés ? »

Les commentaires sont fermés.

Ce site Web utilise des cookies pour améliorer votre expérience. Nous supposerons que vous êtes d'accord avec cela, mais vous pouvez vous désinscrire si vous le souhaitez. Accepter En savoir plus