Bénin: – prescription de l’ordonnance médicale : de l’arnaque ?

La vie des usagers et patients du Centre hospitalier universitaire départemental de l’Ouémé n’est du tout pas reluisante. En plus du stress que provoque l’état de santé des parents ou proches hospitalisés, les gardes-malades devront encore subir le diktat des agents avec des prescriptions médicales à la limite fantaisistes.

Centre hospitalier universitaire départemental de l’Ouémé, ce mardi 10 mars 2020. Il sonnait 20 h environ quand Fifamè, 31 ans, entre dans le centre et franchit le couloir de la maternité. Accueillie chaleureusement (ce qui est parfois rare dans ce même centre) par l’aide-soignante de garde, Fifamè a été consultée par la sage-femme qui établit, sans plus tarder, une ordonnance médicale.

Ayant accompagné sa femme, le mari prend l’ordonnance. Direction, la pharmacie pour l’achat des produits en vue de faciliter l’accouchement de sa femme en travail. Ce fut, comme c’est le cas d’ailleurs, la toute première ordonnance d’une série avant la sortie de l’enfant.

« Si je trouve normale la prescription d’une ordonnance après la première consultation, j’ai été étonné de constater sur le papier, la prescription d’une boîte de gangs latex. Payer les gangs dans un centre hospitalier public, pour moi, cela sort de l’entendement », s’est étonné le mari.

En examinant les autres produits de l’ordonnance, poursuit-il, on a bien l’impression que c’est pour les gangs que l’ordonnance a été prescrite.

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Le cas de Fifamè n’est qu’un cas de plus. De nombreux témoignages font état des pratiques douteuses dans des services de ce centre et qui sont orchestrées par des agents de la maison. Des médicaments prescrits mais qui ne seront jamais utilisés, des produits censés être fournis par l’Etat par le biais de l’administration du centre qui sont prescrits aux patients pour achat, un accueil à désirer devenu la norme surtout chez les aides-soignants et autres auxiliaires de la maison ; la liste est bien loin d’être exhaustive.

Alertés une énième fois par le cas de Fifafmè, nous avons interrogé quelques responsables sur la prescription des gangs latex, des fils de suture et autres entrant dans le matériel de travail de l’agent de santé. Unanimement, ils ont reconnu la maladresse dans la prescription d’une telle ordonnance médicale.

Dans l’enceinte du Centre hospitalier universitaire départemental de l’Ouémé, un numéro est affiché presque partout pour dénoncer  tout comportement suspect des agents. En présence du mari, avec en main l’ordonnance  « de gangs latex », nous avons joint le 65 . . . . 22. Au bout du fil, une voix masculine nous reçoit avec une certaine courtoisie téléphonique. Sans avoir décliné son identité comme l’appelant, il s’est montré étonné face à une telle prescription. « C’est inadmissible que les agents prescrivent un tel produit. Mais monsieur, prenez votre mal en patience et rassurez-vous du fait que des démarches seront entreprises pour décourager une telle pratique », ainsi parla l’interlocuteur au bout du fil.

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Pour beaucoup, c’est un engagement indirectement pris pour sanctionner les auteurs étant donné que l’ordonnance porte une date, une signature et a été délivrée au niveau du service maternité. Mais, sauf changement pour ce cas, rien ne se fera. En fait, en décembre 2019 où nous avions reçu la même plainte presque d’un patient du même centre, suite à notre appel en son temps, c’est pratiquement le même discours que celui de ce 10 mars 2020.

De nos recoupements, il ressort que non seulement les agents continuent de le faire, et même dans d’autres services, mais avec parfois la complicité de certains responsables. Une pratique qu’ont dénoncée d’ailleurs nombres de patients et usagers du centre. La pratique pourrait également intervenir dans d’autres centres de santé publique, mais celle du centre hospitalier universitaire départemental est bien préoccupante.

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« A l’ère des réformes et au nom du droit du Béninois à l’accès au soin de santé, j’invite le gouvernement en place  à se pencher sur la question en vue de garantir un meilleur traitement sanitaire à tout usager en mettant fin à cette pratique orchestrée par certains agents indélicats », a vivement lancé le mari de Fifamè,, désormais papa d’une petite fille.

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