Bénin: l’adoption d’une loi explicative du code électoral, une méprise de la cour suprême

Les députés ont adopté, ce mardi 2 juin 2020, à l’unanimité des parlementaires présents et représentés, une proposition de loi explicative et complétive de la loi portant code électoral. Pour parvenir à cette modification, ils ont avancé, comme argument, le blocage de l’élection des maires. Ce faisant, les parlementaires ont contourné la cour suprême, qui, pourtant, a une mission de gestion des contentieux issus des élections communales.

Les députés de la huitième législature ont jugé, ce mardi 2 juin 2020, de l’opportunité d’éclairer les zones d’ombre de la loi portant code électorale en République du Bénin, par l’adoption, en procédure d’urgence, d’une loi explicative et complétive. Cette démarche de la représentation nationale est une violation de la constitution et une méprise pour la cour suprême.

En effet, selon les textes de la République, en l’occurrence la constitution de 1990, les juges de la cour suprême ont compétence pour gérer les contentieux électoraux. Ces contentieux peuvent résulter de la mauvaise interprétation ou la compréhension floue de la loi. Mais, ignorant royalement la haute juridiction, les députés de la huitième législature, se targuant de la difficulté d’interprétation de la loi, ont procédé à son amendement en pleine application.

La démarche des parlementaires béninois est une méprise pour la république, car une méprise pour la cour suprême, juge du contentieux. En effet, selon l’article 131 de la constitution, la Cour suprême est la plus haute juridiction de l’Etat, en matière
administrative, judiciaire et des comptes de l’Etat. Elle est également compétente, en ce qui concerne le contentieux des élections locales.

Le pseudo blocage de l’élection des maires de certaines communes, qui n’est en réalité qu’un caprice de certains élus locaux, constitue un contentieux issu des élections communales et municipales du 17 mai dernier. Face aux jeux qui s’observent dans certaines communes, c’est à la cour suprême de siffler la fin de la récréation, en donnant une interprétation des articles du code électoral, consacrés à l’élection des maires des différentes communes.

La cour suprême s’éclipse devant le jeu politique 

S’il est de la mission de l’assemblée nationale de légiférer, il est de celle de la cour constitutionnelle et de la cour suprême, disons, de façon générale, du judiciaire d’interpréter la loi mise à la disposition de la République par la représentation nationale.

C’est donc au juge des contentieux de la cour suprême qu’ il revenait, dans le pseudo blocage évoqué dans l’élection des maires, d’apprécier s’il y a effectivement blocage et si ce blocage constitue un contentieux. L’interprétation que l’on peut être amené à faire de la démarche des députés, c’est qu’ils ne veulent pas que, par son interprétation, la cour suprême fausse les calculs politiciens qui sous-tendent l’élection des maires.

Mieux, selon le protocole de la Cedeao, la loi électorale ne peut pas faire l’objet de modification en plein processus électoral. La voie de sortie qui s’impose naturellement, face à ce qui se déroule depuis le lancement du processus d’installation des conseils communaux et de l’élection des maires, était de discipliner les conseillers au sein des partis et, en cas de contentieux, saisir la cour suprême.

En contournant ainsi le juge du contentieux de la cour suprême, les députés semblent conformer que le blocage de l’élection de certains maires est dû au fait que les partis politiques veulent imposer des conseillers communaux, sur lesquels ils sont sûrs de pouvoir compter pour le système de parrainage des candidats à l’élection présidentielle de 2021.

 

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