Bénin: Komi Koutché raconte son séjour carcéral à Madrid dans « Ma Version »

Dans son ouvrage « Ma Version », l’ancien ministre Komi Koutché parle de son séjour carcéral, près de deux ans après son arrestation à Madrid, en Espagne. Cette période de sa vie a été narrée sur plusieurs pages dans le livre « Ma Version », lancé le vendredi 28 Août 2020.

Dans son essai politique, l’ancien ministre de l’économie et des finances n’a pas occulté les jours difficiles passés à Madrid. Il est revenu sur son séjour carcéral qui l’a visiblement marqué dans cette épreuve à laquelle il a été soumise en Espagne. « Ce furent sans doute les moments les plus difficiles de ma vie. Incapable de parler avec ma famille depuis mon arrivée, pour leur donner de mes nouvelles. La seule occasion que j’ai eue de laisser un mot à mon épouse a été le vendredi soir, à mon arrivée au centre de détention », a-t-il écrit.

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C’est justement ce vendredi soir du 14 décembre 2018 qu’il va découvrir la réalité qui se cache derrière les murs d’une prison. «… Arrivée au centre de détention, le vendredi 14 décembre  2018 dans la soirée, j’ai été placé avec d’autres détenus, pour la plupart condamnés pour des crimes et délits variés, drogue, assassinat et j’en passe. Que voulez-vous ?  Mon propre pays, sur la base d’un faux document, m’a fait passer pour un criminel. Par conséquent, je me retrouve parmi les criminels », lit-on à la page 111 du livre « Ma Version ».

« Il était juste possible de voir le soleil deux (02) heures par jour »

Après les formalités de placement en détention, Komi Koutché, accusé de détournement et poursuivi au Bénin, sera installé dans une autre cellule. « …nous avons été repartis dans les cellules d’un bâtiment d’attente appelé  » ingresso ». Je devais y rester le week-end dans la même cellule qu’un jeune brésilien arrêté pour avoir ingurgité de la drogue et voyageant de la Colombie pour l’Europe », a-t-il confié.

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Dans ce centre d’attente, il était juste possible de voir le soleil deux (02) heures par jour, de 10 heures à 12 heures. Ainsi ce sont déroulés mes trois premiers jours de détention jusqu’au lundi suivant.

Komi Koutché, « Ma Version »

Sans nouvelles de sa famille depuis son interpellation, Komi Koutché avait tenu à contacter ses proches avant son incarcération. Mais il avait exactement 60 secondes pour manipuler son téléphone. A la vue des messages et appels manqués de son épouse et de sa fille, il a été envahi par une émotion qui n’a pas laissé indifférent la personne qui le supervisait.

Le détenu chargé de suivre cette opération a tout de suite compris mon désarroi. Après les 60 secondes, je lui retourne, par respect des règles, le téléphone. Il me demande en anglais << have you finished ? >> et je lui réponds << yes >>. Il me relance << sure ?>>. J’ai compris qu’il voulait me faire une faveur. Je reprends alors le téléphone et je rentre dans la messagerie de mon épouse pour lui laisser un mot à la manière  télégraphique : « détenu à Madrid ». En voyant arriver un fonctionnaire du centre pénitentiaire, il m’arrache le téléphone, mais le message était déjà parti.

Komi Koutché

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« Ce week-end fut le plus sombre moment de mes 42 ans de vie sur cette terre »

Après le petit moment d’échanges avec son épouse, Komi Koutché et les autres détenus qui venaient d’arriver ont été conduits dans les chambres du bâtiment « Arrivée » . « J’avais affaire, sur le même palier, à des criminels de grande envergure, capable de crier à longueur de nuit. J’y ai même rencontré deux djihadistes , terroristes », a-t-il fait savoir.

Ce week-end fut le plus sombre moment de mes 42 ans de vie sur cette terre. Je me demandais comment je pouvais me retrouver à cet endroit qui n’était pas le mien et ceci  sur la base d’un faux document envoyé à l’international par la justice de mon pays, qui évidemment est devenue la justice du prince.

Komi Koutché

Des questionnements sans réponses, Komi Koutché était au fond du trou et n’y comprenait absolument rien. Il lui est même arrivé de se poser des questions sur sa bonne foi démontrée le 06 avril 2018. Il ne comprenait plus pourquoi il s’est personnellement présenté à la justice de son pays le 6 Avril 2018 dans le but d’élucider cette affaire de détournement, dans laquelle il est le principal accusé.

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Pourquoi m’étais-je gêné à me présenter à la justice de mon pays le 6 Avril 2018 si, malgré cela,  la déchéance morale pouvait inciter nos dirigeants à user d’un mandat d’arrêt annulé par la comparution et par une ordonnance du juge qui l’a émis, juste pour créer  des difficultés que la Nation est pourtant chargée de protéger ? Je vivais mal cette injustice, mais je n’avais personne à qui me confier. »

Komi Koutché

La liberté provisoire…

Après un mois passé en détention, Komi Koutché a bénéficié le 17 janvier 2019, d’une mise en liberté provisoire. Mais il a été contraint de rester sur le sol espagnol pendant 40 jours, en attendant l’examen de la demande d’extradition introduite par le Bénin.

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Le 23 avril 2019, la justice espagnole a donné son verdict sur la demande d’extradition de l’ancien ministre Komi Koutché, accusé de détournement par son pays le Bénin. Après analyse du dossier, la justice espagnole a purement et simplement rejeté la demande d’extradition. Komi Koutché a été donc définitivement libéré.

Quand la Criet revient à la charge…

Après cette décision de la justice espagnole, la Cour de répression des infractions économiques et du terrorisme (Criet) qui examinait déjà le dossier au Bénin, est revenue à la charge. Les choses sont allées très vite de ce côté. Dans la nuit du vendredi 03 au samedi 04 avril 2020, Komi Koutché a été condamné par contumace à 20 ans de réclusion criminelle et à 500 millions F Cfa d’amende ferme, par les juges de cette Cour spéciale.

Les chefs d’accusations…

La Cour de répression des infractions économiques et du terrorisme (Criet) a retenu contre Komi Koutché, ancien directeur général du Fnm, les faits de détournement de deniers publics et d’abus de fonctions. Selon le verdict, la cour a acquitté purement et simplement Komi Koutché des chefs d’inculpation d’enrichissement illicite, de blanchiment de capitaux et de corruption dans les passations des marchés publics mis à sa charge.

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La même cour a ordonné la confiscation au profit de l’Etat béninois de tous les avoirs en banque de Komi Koutché ouverts dans les livres de Boa-Bénin et de Bsic contenant un montant total d’environ 15 millions F Cfa et le Dépôt à terme d’une somme de 90 millions en compte à la Bibe Finance and security. La sentence ordonne également la saisie des biens immobiliers de l’ancien directeur général du Fnm, au nombre de 13 sis à Cotonou, Abomey-Calavi et Bantè.

A en croire la cour, les produits issus de la vente par voie régulière de ses biens immeubles seront versés au Trésor public. Aussi, décerne t-elle par ailleurs un mandat d’arrêt contre l’ex-directeur général du Fnm.

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