Polémique sur la dette envers les travailleurs: les « professionnels des médias » comme échappatoire ?

Dans sa « supposée » rencontre avec des professionnels des médias, samedi 17 octobre 2020, l’argentier national du Bénin, Romuald Wadagni, a tenu à « repréciser les conclusions de la rencontre entre les représentants des travailleurs et le Chef de l’Etat, Patrice Talon ». Mais cette rencontre, s’il y en a eue, n’est qu’un mépris à l’endroit des professionnels des médias, voire toute une corporation.

Une seule sortie médiatique pour finalement deux déclarations, toutes présentées comme l’intégralité des déclarations du ministre des finances, faites devant des professionnels des médias. Le gouvernement aurait-il fait preuve de ruse dans sa tentative de taire la polémique suite à la publication de Patrice Talon sur Facebook, des mesures qu’il a prises pour apurer la dette de l’Etat envers les travailleurs ? C’est la question que se posent plusieurs avertis de la chose politique depuis la dernière sortie médiatique de Romuald Wadagni, l’argentier national, sur la question des dettes de l’Etat envers les travailleurs.

En effet, pour trancher sur la passe d’armes entre Patrice Talon et son prédécesseur, Boni Yayi, sur les arriérés dus aux travailleurs de l’administration publique, le ministre de l’Economie et des Finances, Romuald Wadagni, a fait une sortie explicative. Selon la cellule de communication présidentielle, il s’agirait d’une séance d’explication devant les professionnels des médias et tenue le samedi 17 octobre, soit quelques heures avant la levée de bouclier contre les déclarations de Patrice Talon sur sa page Facebook.

Chronologie des évènements !

Le samedi 17 Octobre 2020 à 11: 38 minutes (Heure du Bénin), le Président Patrice Talon a annoncé sur sa page Facebook, avoir hérité du gouvernement défunt, d’arriérés pharamineux dus aux travailleurs de l’administration publique. Une publication faite après la rencontre, vendredi 16 Octobre 2020, entre des responsables syndicaux et le Président béninois, Patrice Talon, au sujet d’arriérés que réclament les fonctionnaires.

Cette information, selon laquelle l’ancien Président Boni Yayi serait le responsable de ces dettes, aura également été confirmée par un communiqué du secrétaire général confédéral des centrales syndicales du Bénin, Nagnini KASSA MAMPO. Un communiqué en date du 16 octobre 2020. Ces déclarations, publications et communiqués ont ainsi déclenché une avalanche de réactions.

Samedi 17 Octobre 2020 à 19: 07 minutes (Heure du Bénin), l’ex-Chef de l’Etat,Boni Yayi, a refusé d’avaler cette fois-ci la pilule, la jugeant très dégoûtante. S’en suivra la réaction de son ministre des finances d’alors, Komi Koutché, qui a également balayé du revers de la main, chiffres et analyses à l’appui, cette déclaration de l’actuel Président de la République. Après ces deux hommes politiques, d’autres réactions, des plus lucides et cohérentes aux plus incongrues et illogiques, s’en suivront de la part des « économistes improvisés », des personnalités et des internautes. Une avalanche de réactions qui allait dans tous les sens jusqu’à la date du lundi 19 octobre 2020 où le gouvernement fit intervenir « des professionnels des médias ».

De quels professionnels des médias était-il question ?

Lundi 19 octobre 2020, en fin de matinée, une réaction du ministre de l’économie et des finances, Romuald Wadagni, sur cette dette salariale, a été largement relayée par plusieurs médias. Chose étrange, aucune précision n’a été donnée sur la date de l’enregistrement de ladite réaction, ni le cadre.

A 12h34 minutes de ce lundi 19 octobre 2020, ladite réaction sera relayée sur les différentes plateformes officielles du gouvernement. Les textes ont été les mêmes que ceux relayés par les médias et présentés comme une transcription complète et intégrale des propos du ministre lors de sa fameuse rencontre. C’est ainsi que la date du « samedi 17 octobre 2020 » apparaîtra pour la première fois, comme référence temporelle. Il est également notifié que « le ministre de l’Economie et des finances, Romuald WADAGNI, a rencontré des professionnels des médias … pour repréciser les conclusions de la rencontre entre les représentants des travailleurs et le Chef de l’Etat, Patrice Talon. »

Si l’omerta du gouvernement sur l’identité desdits professionnels des médias aura été de rigueur dans les textes publiés, la vidéo publiée ce mardi 20 octobre 2020 dévoilera enfin le pot aux roses. Une vidéo de 5mn 06 secondes au total, supposée enregistrée depuis le « samedi 17 octobre 2020 » mais dont le traitement aura nécessité près de 72 heures par la « dynamique » équipe de communication du gouvernement et sans qu’aucune presse écrite dans leur parution du lundi n’ait daigné relayer.

Capture d’écran de la vidéo de clarification du Ministre de l’Economie et des Finances, Romuald WADAGNI, au sujet de l’apurement des arriérés de salaire des travailleurs

La supercherie sera à son comble lorsque les images ne présentent aucuns journalistes en plan de coupe pour illustrer le supposé « point de presse ». Ni même un plan large ou d’ensemble pour montrer que l’événement a été tenu en public. Ce dernier constat est tellement évident, malgré le travail « ingénieux » en amont du cadreur et le traitement « professionnel » en aval du monteur. Comme quoi, le crime parfait n’existe pas.

Même événement, différentes déclarations?

Le dernier indice de cette communication qui peut être qualifiée d’antidatée est l’inconformité entre le texte publié, mis à la disposition des médias, et le speech de l’argentier national.

Inconformité parce qu’il est écrit expressément, « Retrouvez ci-dessous, la vidéo intégrale des explications de l’argentier national« . Le gouvernement nous a pourtant habitués à des points de presse. Tout porte à croire que le texte a été savamment préparé, minutieusement étudié, avant de tomber dans les mains des supposés professionnels des médias.

Capture d’écran – page Facebook du gouvernement

Alors, plusieurs questions taraudent les esprits, au vu de l’arnaque orchestrée par l’équipe de communication du gouvernement, pour berner l’opinion publique avec la connivence diabolique de ces supposés professionnels des médias, qui ont reconnu avoir été présents ce samedi 17 octobre 2020.

Le gouvernement voudrait-il se rattraper, au vu de la tournure de la publication du premier magistrat ? Pourquoi ne pas permettre à Orounla de faire un point de presse, comme d’habitude ? Après la  »normo-communication » gouvernementale qui s’est révélée inefficace, voudrait-on inviter un autre modus operandi pour bluffer le peuple ? Quelle qualité de presse rêve le Bénin, au vu de ces machinations ?

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