Sahel – Terrorisme: quand Emmanuel Macron méprise les soldats africains

Le Président français Emmanuel Macron a tenu quelques discours après la rencontre de Pau avec les dirigeants des pays du G5 Sahel. Il a accusé des puissances étrangères d’alimenter le sentiment anti-français mais aussi a indiqué que ce sont les soldats français qui meurent pour la sécurité des maliens, nigériens, burkinabés, et celle de leurs enfants.

« … qu’ils nous disent qui se fait tuer pour la sécurité de leurs enfants ? Moi je sais qui est tombé pour la sécurité des maliens, des nigériens, des burkinabés : des soldats français… », a déclaré Macron après le sommet de Pau en France où il a « convoqué » les dirigeants des cinq pays du Sahel touchés par le terrorisme. Cette phrase de Macron se présente comme plus qu’insultant pour ces centaines de soldats maliens, nigériens, burkinabés, tchadiens et mauritaniens qui sont tombés dans les combats contre les terroristes et aussi pour la sécurité et la stabilité de leurs Etats.

Des soldats français sont certes morts en venant en « aide », si on peut appeler ça une aide, dans cette lutte pour la sécurité du Sahel, mais ils ne sont pas les seuls à payer le prix extrême dans cette lutte. Emmanuel Macron a été maladroit en pensant pouvoir émouvoir ou encore convaincre les africains de la bonne foi de la France quand elle s’est engagée dans cette lutte ; au lieu de ça, il s’est plongé en ignorant complètement le sacrifice extrêmement lourd des soldats africains dans la région.

De quoi se vante même Macron ?

Macron exprime fièrement l’efficacité de ses troupes dans le combat contre le terrorisme dans le Sahel mais le résultat de la force Barkhane est plutôt très mitigé. Plusieurs observateurs se sont rendu compte de l’efficacité et du caractère pragmatique de l’armée française sur le terrain africain quand elle décide de vraiment mener combat. On l’a vu en Côte d’Ivoire lorsqu’elle a décidé d’aider les rebelles à mener un « coup de force » contre le Président de la république ; on l’a vu quand elle est intervenue en Centrafrique dès les premières heures du déploiement de « Sangari » en décembre 2013 ; également, les soldats français, sous l’opération Serval, ont réussi en quelques jours seulement, à repousser les forces rebelles et islamistes qui tentaient de s’accaparer du pays en 2012. Tant de faits et de succès à l’actif de cette force étrangère qui alors, a été saluée comme un sauveur.

Mais alors, que s’est-il passé pour que les forces françaises deviennent aussi controversées dans le cœur de ceux-là mêmes qui autrefois les avaient louées ? En effet, depuis que Serval transformé en Force Barkhane est dans le Sahel avec ses 4500 soldats, ses hélicoptères, ses chasseurs bombardiers, une technologie de renseignement de dernière génération, des drones et des armes modernes, le terrorisme s’est accru. Il ne se passe pas une seule semaine sans que plusieurs attaques n’aient lieu. Comment comprendre que depuis la présence d’une telle force, une « véritable force », les terroristes aussi se sont renforcés en se dotant par magie, d’armes de point et rivalisant pratiquement d’égal à égal avec les armées régulières africaines ? L’impression que tout cela donne est que les Français ne protègent que leurs bases et alentours, laissant les armées locales faire le travail. Tant que durera le terrorisme, ils resteront là pour, on ne sait quel objectif réel.

Discours anti-français justifié

Cette presqu’inefficacité des hommes à Macron ajoutée à la montée vertigineuse de la menace terroriste au Sahel et aux nombreuses attaques contre les soldats locaux qui meurent par centaines a fait réagir les populations. Au Sahel et en Afrique, on se demande ce qui qu’est le rôle de l’Armée française si tant est qu’elle ne sert pas à réduire les attaques terroristes, les massacres des fils et filles d’Afrique. C’est d’abord de là qu’est parti le « discours anti-français ». Ensuite, il y a eu le comportement méprisant et à la limite de l’irrespect, du Président français à l’égard des dirigeants des pays du Sahel.

Si certaines autres puissances alimentent le sentiment anti-français en Afrique, comme le dit Macron, il faut tout au moins reconnaître qu’alimenter, même si des doutes sur cela il y en a, n’est pas créer. Ce sentiment est né naturellement au regard de l’attitude de la France vis-à-vis des pays qui autrefois, étaient ses colonies. Macron, qui indique ne pas avoir connu la période de l’impérialisme et qui soutient que sa politique est tout autre que celle de la traditionnelle France-Afrique, se présente malheureusement comme un exécutant du même système, mais avec plus de suffisance et d’insolence. C’est grave de dire que ce sont les soldats français qui viennent mourir pour la sécurité des africains au Sahel. S’il trouve que son « aide » est un trop gros sacrifice, pourquoi rester ? Et qu’il ne dise surtout pas que c’est par solidarité ou amitié car on le sait, « la France n’a pas d’amis, elle n’a que des intérêts ».