Bénin: le 6 Avril, Talon perd sa légitimité (l’intégralité de la déclaration de Djènontin)
Le premier vice-président du mouvement « S’engager pour le Bénin » a fait, ce mercredi 2 Décembre 2020, une importante déclaration sur l’élection présidentielle de 2021.
Les enjeux de la présidentielle du 11 Avril 2021 et les plans en gestation par le pouvoir de Patrice Talon sont l’essentiel à retenir de la déclaration de ce mouvement, lue par l’ancien ministre, Valentin Djènontin.
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A en croire Valentin Djènontin, vice-président du mouvement « s’engager pour le Bénin », la constitution de Février 2019, adoptée par le peuple béninois par référendum, est la seule encore en vigueur à la date d’aujourd’hui.
Ainsi, pour l’ancien ministre, le parlement installé par le régime de la rupture en 2019 et qui œuvre avec zèle à la démolition de l’édifice démocratique béninois par le vote d’une nouvelle constitution, d’un code électoral d’exclusion et d’une charte des partis politiques déconnectée des réalités socio-politiques du Bénin, s’associe au gouvernement pour confisquer le pouvoir d’Etat au-delà du 5 Avril 2021.
Par conséquent, le mouvement « s’engager pour le Bénin », à travers la déclaration lue par son vice-président, Valentin Djènontin, tient à rappeler au chef de l’Etat qu’il a prêté serment le 6 Avril 2016 et que son mandat prend fin le 5 Avril 2021.
A partir de cette date, précise Valentin Djènontin, le président de la République perd sa légitimité et peut se voir appliquer l’article 50 de la constitution de 1990 qui stipule: » En cas de vacance de la présidence de la République par décès, démission ou empêchement définitif, l’Assemblée nationale se réunit pour statuer sur le cas à la majorité absolue de ses membres. Le président de l’Assemblée nationale saisit la Cour constitutionnelle qui constate et déclare la vacance de la présidence de la République.« . Lire ci-dessous l’intégralité de la déclaration du mouvement « s’engager pour le Bénin ».
Déclaration du mouvement « S’engager pour le Bénin »
Béninoises, béninois !
Chers compatriotes !
En ce jour mémorable du 02 décembre 2020, j’ai choisi de m’adresser à vous pour vous révéler les anguilles sous roche de la présidentielle de 2021.
02 décembre 1990 – 02 décembre 2020, il y a trente ans (30), le peuple béninois a adopté par référendum la constitution de 1990, sa constitution, la seule encore en vigueur.
Le 06 avril 2016, le Président Patrice TALON, conformément aux dispositions de l’article 53 de la Loi N°90-32 du 11 décembre 1990 portant constitution de la République du Bénin, a prêté serment en jurant de respecter et de défendre la constitution que le Peuple béninois s’est librement donné. En effet, la constitution du 11-12-1990 a été adopté par Référendum du peuple béninois le 02-12-1990.
Aucune autre constitution jusqu’à ce jour ne porte les empreintes du peuple souverain du Bénin.
Malheureusement, depuis le 06 avril 2016, nous assistons à une dégradation continue de la situation socio-politique et économique du Bénin en raison de la gouvernance du pouvoir de la rupture.
En effet, force est de constater que le régime dit de la rupture se caractérise entre autres par :
- La violation répétée de la constitution et le refus de tenir compte du consensus érigé en valeur constitutionnelle dans le vote des lois et la mise en place des institutions de la République ;
- La multiplication et le vote de lois scélérates, cyniques et abjectes par le parlement aux ordres ;
- La mise sous boisseau systématique des libertés démocratiques par la restriction de la liberté d’expression, de presse, d’associations et de manifestations ;
- L’acharnement contre les opposants par le biais d’un simulacre de lutte contre la corruption en les contraignant à l’exil ;
- L’arrestation et l’emprisonnement arbitraires de nombreux opposants pour leurs opinions politiques ;
- L’assujettissement du pouvoir judiciaire à l’exécutif avec pour conséquence le développement des conflits d’intérêts au sommet de l’Etat, la condamnation arbitraire des opposants par une cour d’exception (Cour de Répression des Infractions Economiques et du Terrorisme) ;
- La vassalisation des institutions de contre-pouvoirs (Assemblée Nationale, Cour Constitutionnelle, Cour Suprême, Haute Autorité de l’Audiovisuel et de la Communication, Conseil Economique et Social, Commission Electorale Nationale Autonome.)
Ce tableau sombre est devenu lugubre avec l’organisation des élections législatives exclusives du 28 avril 2019 par lesquelles le Chef de l’Etat a nommé ses 83 commis appelés députés de la 8è législature. Par cet acte, Monsieur Patrice TALON a clairement affiché sa volonté d’instaurer définitivement dans notre pays une dictature.
Les députés ainsi nommés ont été installés au milieu des chars et engins de guerre tournés vers le peuple qu’ils sont censés curieusement représenter.
Ce parlement accomplit avec zèle son œuvre de démolition de l’édifice démocratique béninois par le vote d’une constitution Talo d’un code électoral d’exclusion et d’une charte des partis politiques déconnectée des réalités socio-politiques du Bénin.
Ce cocktail de lois constitue le socle du plan machiavélique concocté par Talon et ses affidés pour faire basculer le Bénin dans la violence en 2021 avec des conséquences imprévisibles de tout point de vue.
Malgré le vote d’un nouveau code aux lendemains des législatives (Loi N° 2019-43 du 15 novembre 2019) pour mieux contrôler les élections communales de 2020, le régime Talon ne s’est pas empêché de recourir encore à l’Assemblée Nationale en pleine installation des conseils communaux et des maires pour le vote d’une nouvelle loi qui ordonne la désignation des maires au lieu de leur élection par leurs pairs conseillers communaux ou municipaux. (Loi N°2020-13 du 04 juin 2020 portant interprétation et complétant la Loi N°2019-43 du 15 novembre 2019 portant code électoral.)
Cette modification du code électoral en plein processus électoral viole violemment et intégralement le protocole A/SP1/12/01 sur la démocratie et la bonne gouvernance additionnel au Protocole relatif au mécanisme de préventions, de gestion, de règlement des conflits, de maintien de la paix et de la sécurité.
Pourquoi l’élection présidentielle du 11 avril 2021 ne doit-elle pas avoir lieu ?
I- LE MANDAT CONSTITUTIONNEL DE CINQ ANS DU PRESIDENT TALON FINIT LE 05 AVRIL 2021.
Le mandat constitutionnel du Président Patrice Talon débuté le 06 avril 2016 après serment est de cinq ans et finit le 05 avril 2021 à minuit.
Le Bénin s’apprête à vivre en 2021 le premier coup d’Etat constitutionnel et institutionnel de son histoire démocratique depuis 1990.
A Lire aussi:
Pour la clarté de la compréhension et pour lever toute équivoque, je reproduis ici l’intégralité de la décision de la Cour Constitutionnelle relative à la proclamation définitive des résultats du second tour de l’élection présidentielle de 2016.
La Cour constitutionnelle,
VU la loi n° 90-032 du 11 décembre 1990 portant Constitution de la République du Bénin ;
VU la loi n° 91-009 du 04 mars 1991 portant loi organique sur la Cour constitutionnelle modifiée par la loi du 31 mai 2001 ;
VU la loi n° 2013-06 du 25 novembre 2013 portant Code électoral en République du Bénin ;
VU le décret n° 2014-118 du 17 février 2014 portant attributions, organisation et fonctionnement du secrétariat général de la Cour constitutionnelle ;
VU le règlement intérieur de la Cour constitutionnelle ;
VU la proclamation provisoire du 13 mars 2016 des résultats du premier tour de l’élection présidentielle du 06 mars 2016 ;
VU le décret n° 2016-126 du 14 mars 2016 portant convocation du corps électoral pour le second tour de l’élection présidentielle ;
VU la proclamation provisoire, le 25 mars 2016, des résultats de l’élection présidentielle du 20 mars 2016 ;
Considérant qu’aucune contestation relative à la régularité des opérations électorales n’a été déposée au greffe de la Cour par l’un des candidats dans les cinq jours de la proclamation provisoire comme le prescrit l’article 49 alinéa 3 de la Constitution ;
En conséquence :
Article 1er.- Proclame définitivement élu président de la République Monsieur Patrice Athanase Guillaume Talon.
Article 2.- Dit que conformément à l’article 47 alinéa 2 de la Constitution et au serment prêté le 06 avril 2011, le mandat du président de la République en exercice expire le 05 avril 2016 à minuit et qu’en application de l’article 52 de la Constitution, il est tenu de faire sur l’honneur une déclaration écrite de tous ses biens et patrimoine adressée à la Chambre des Comptes de la Cour suprême.
Article 3.- Dit que le mandat de monsieur Patrice Athanase Guillaume TALON, élu président de la République, prend effet pour compter du 06 avril 2016 à 00 heure.
Article 4.- Dit qu’avant son entrée en fonction, monsieur Patrice Athanase Guillaume Talon doit prêter le serment prévu à l’article 53 de la Constitution.
Article 5.- Dit enfin que, conformément à l’article 52 alinéa 2 de la Constitution, monsieur Patrice Athanase Guillaume Talon est tenu, lors de son entrée en fonction, et à la fin de celle-ci, de faire sur l’honneur une déclaration écrite de tous ses biens et patrimoine adressée à la Chambre des Comptes de la Cour suprême.
Article 6.- La présente proclamation sera notifiée à monsieur Patrice Athanase Guillaume Talon, à Monsieur le président de la République, à monsieur le président de l’Assemblée nationale, à monsieur le président de la Commission électorale nationale autonome (Céna) et publiée au Journal officiel.
Ont siégé à Cotonou, le trente mars deux mille seize
Messieurs Théodore HOLO Président
Zimé Yérima KORA-YAROU Vice-président
Simplice C. DATO Membre
Bernard D. DEGBOE Membre
Madame Marcelline-C. GBEHA.AFOUDA Membre
Monsieur Akibou IBRAHIM G. Membre
Madame Lamatou NASSIRI Membre.
Après cette proclamation définitive des résultats du second tour de l’élection présidentielle de 2016 déclarant Monsieur Patrice Talon élu Président de la République du Bénin, celui-ci doit prêter serment.
Le mercredi 06 avril 2016 à 11H45, après lecture de la proclamation des résultats définitifs de l’élection présidentielle du 20 mars 2016, le Président de la République, Patrice Athanase Guillaume TALON a prêté serment.
Au stade Charles de Gaulle de Porto Novo en présence des membres des institutions de la République notamment la Cour Constitutionnelle, l’Assemblée Nationale et la Cour Suprême, le Président a prêté le serment constitutionnel conformément à l’article 53 de la Constitution béninoise qui prescrit qu’avant son entrée en fonction, le Président de la République prête un serment. Main droite levée et les yeux fixés sur le regard du Président Théodore HOLO, le Président de la République prononce le serment dont voici la teneur :
« Devant Dieu, les Mânes des Ancêtres, la Nation et devant le Peuple béninois, seul détenteur de la souveraineté ;
Nous Patrice Athanase Guillaume Talon, président de la République, élu conformément aux lois de la République jurons solennellement :
• de respecter et de défendre la Constitution que le Peuple béninois s’est librement donnée ;
• de remplir loyalement les hautes fonctions que la Nation nous a confiées ;
• de ne nous laisser guider que par l’intérêt général et le respect des droits de la personne humaine, de consacrer toutes nos forces à la recherche et à la promotion du bien commun, de la paix et de l’unité nationale ;
• de préserver l’intégrité du territoire national ;
• de nous conduire partout en fidèle et loyal serviteur du peuple.
En cas de parjure, que nous subissions les rigueurs de la loi ».
Le serment est reçu par le président de la Cour constitutionnelle devant l’Assemblée nationale et la Cour suprême.
Il faut souligner par ailleurs que les dispositions de l’article 42 de la constitution du 11-12-1990 sont claires sur la durée du mandat présidentiel. Si Talon passe outre, il sera traduit un jour devant les instances judiciaires appropriées pour parjure.
« Le Président de la République est élu au suffrage universel direct pour un mandat de cinq ans. ….. »
Voilà qui est clair.
06 Avril 2016 – 05 Avril 2021, Talon aura fait les cinq ans constitutionnels pour passer service au nouveau président élu.
A compter du 06 avril 2021, Talon au pouvoir se retrouvera illégitime et subira les rigueurs de la loi et du peuple souverain qui ne le reconnaîtra plus comme son Président de la République.
Quelles sont les nouvelles dispositions de la constitution Talon de 2019 et du code électoral tripatouillés ?
Les articles 153 et 157 de la Loi N° 2019-40 du 07 Novembre 2019 portant révision de la Loi N° 90-32 du 11 décembre 1990 portant Constitution de la République du Bénin sont le siège du coup d’Etat en perspective.
Article 153-3 :
« L’élection du Président de la République est organisée le deuxième dimanche du mois d’avril de l’année électorale.
Un second tour du scrutin est organisé, le cas échéant, le deuxième dimanche du mois de mai.
En aucun cas, l’élection du Président de la République ne peut être organisée simultanément avec les élections législatives et les élections communales. »
Dans tous les cas, le Président de la République élu entre en fonction et prête serment le quatrième dimanche du mois de mai. »
L’article 131 de la Loi N° 2019-43 du 15 novembre 2019 portant Code électoral en République du Bénin dispose : « Le président de la République élu entre en fonction et prête serment le quatrième dimanche du mois de mai de l’année électorale.
Le vice-président élu entre en fonction au même moment que le président de la République élu. »
Il ressort clairement des dispositions des articles sus cités, que dans le cadre de l’élection présidentielle de 2021, le processus se déroulera suivant le calendrier ci-après :
Date du premier tour : dimanche 11 avril 2021
Date du second tour : dimanche 09 mai 2021
Date de prestation de serment et d’entrée en fonction du président élu : 30 mai 2021.
Il se dégage de ces dispositions un coup d’Etat constitutionnel et un vaste complot ourdi contre le peuple béninois, seul détenteur de la souveraineté nationale.
Par ces manigances, Patrice Talon, non seulement se permet de modifier unilatéralement la constitution du Bénin avec les dates d’organisation de l’élection présidentielle et de l’installation du nouveau président de la République mais encore, il s’octroie une rallonge d’environ deux mois (54 jours) de son mandat constitutionnel en cours qui prendra fin le 05 avril 2021 à minuit.
Ce hold-up est subrepticement mentionné dans l’article 157-3 de la constitution de Talon du 07 novembre 2019 qui dispose que « Les dispositions nouvelles concernant l’élection et le mandat du président de la République entrent en vigueur à l’occasion de l’élection du président de la République en 2021.
Le mandat du président de la République en exercice s’achève à la date de prestation du président de la République élu en 2021, à 00 H. »
Lorsqu’on sait que la constitution de 2019 est l’œuvre du président Talon avec son clan et que le président en exercice qui doit passer service en 2021 s’appelle Patrice Talon, il n’est pas exagéré d’affirmer que le Bénin est actuellement dirigé par des manipulateurs, sinon comment comprendre qu’un président élu, qui a prêté serment le 06 avril 2016 pour cinq ans (qui finit le 05 avril 2021), puisse s’octroyer deux mois de bonus illégitimement ; car la date de prestation de serment du nouveau président élu suivant la constitution privée de Talon est le 30 mai 2021.
Avec ce développement que je viens de faire, les sceptiques qui continuent de croire que l’éviction de l’opposition des élections législatives de 2019 n’était pas un acte volontaire et prémédité de Talon pour s’offrir un parlement qui va lui voter des lois dont ils ignorent eux-mêmes le sens et les objectifs, doivent se rendre à l’évidence.
Sinon comment comprendre ce traitement discriminatoire dans la même constitution et le même article entre le président de la République en exercice et les députés ?
Article 157-3 alinéa 4 : « Les nouvelles dispositions régissant l’élection et le mandat des députés entrent en vigueur à l’occasion des élections législatives de 2023. »
Pourquoi ces mêmes dispositions concernant l’élection présidentielle ne peuvent-elles pas entrer en vigueur à l’occasion de l’élection présidentielle de 2026 ?
A quelle logique répond la rallonge illégitime et illégale de deux mois du mandat de Talon en cours ?
Quel préjudice cela va -t-il causer aux prétendues élections générales de 2026 ?
En se plaçant lui-même dans une situation illégitime à compter du 06 avril 2016, toutes les forces vives de la Nation doivent l’aider à se dégager afin de préserver la paix chèrement acquise par le peuple en 1990.
« Ce coup d’Etat constitutionnel et institutionnel ne se passera pas au Bénin.
En tout état de cause, si le 06 Avril 2021 un nouveau président de la République élu ne prête pas serment, l’article 50 de la Constitution du 11 décembre 1990 doit être activé.«
Article 50 : « En cas de vacance de la présidence de la République par décès, démission ou empêchement définitif, l’Assemblée nationale se réunit pour statuer sur le cas à la majorité absolue de ses membres. Le président de l’Assemblée nationale saisit la Cour constitutionnelle qui constate et déclare la vacance de la présidence de la République. »
Les fonctions de président de la République, à l’exception de celles mentionnées aux articles 54 alinéa 3, 58, 60, 101 et 154 sont provisoirement exercées par le président de l’Assemblée nationale.
L’élection du nouveau président de la République a lieu trente jours au moins et quarante jours au plus après la déclaration du caractère définitif de la vacance.
En cas de mise en accusation du président de la République devant la Haute Cour de justice, son intérim est assuré par le président de la Cour Constitutionnelle qui exerce toutes les fonctions de président de la République à l’exception de celles mentionnées aux articles 54 alinéa 3, 58, 60, 101 et 154.
En cas d’absence du territoire, de maladie et de congé du président de la République, son intérim est assuré par un membre du Gouvernement qu’il aura désigné et dans la limite des pouvoirs qu’il lui aura délégués.
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