RDC – Parc des Virunga : la porte du non retour pour les éco-gardes

Le parc des Virunga, dans l’Est de la République démocratique du Congo (RDC), plus ancien parc d’Afrique, et véritable joyau naturel, fait tristement les gros titres de l’actualité congolaise ces dernières semaines.

Crée en 1925, ce parc s’étend sur une surface de 7 800 km² et abrite une grande variété d’espèces animales rares et menacées, comme les gorilles de montagne. Mais il est également le fief de nombreux groupes armés qui y exercent la pêche illicite, le braconnage et l’abattage des bois pour le commerce et qui s’en prennent aussi aux militaires et différents éco-gardes congolais.

Ces dernières semaines, les attaques contre les forces de sécurités déployées au sein du parc se sont multipliées, endeuillant des familles entières. Ce sont, pas moins de 176 éco-gardes qui ont été tués par des éléments armés ces dernières années, d’après la direction du Parc déjà visité par plus de 17 000 touristes depuis 2014, rapporte Anadolu.

La dernière attaque remonte à lundi. Deux militaires et un civil ont alors été tués dans une attaque d’hommes armés contre un convoi dans le parc. Les deux militaires se déplaçaient en moto afin d’assurer la sécurité d’un convoi de civils lorsqu’ils ont été attaqués par des éléments armés, selon les autorités locales.

Le 11 mai, c’est une éco-garde qui a été tuée dans une attaque similaire durant laquelle deux touristes britanniques qu’elle accompagnait, ont été pris en otage avant d’être relâchés 48 heures plus tard, d’après la direction du parc. Depuis, le parc des Virunga a décidé de suspendre ses activités, jusqu’au 4 juin.

Terreur et détresse donc, sont devenus le lot quotidien des habitants de la région et des familles qui perdent un mari, une épouse, un frère, un fils… dans ces attaques. C’est d’ailleurs l’histoire de Gisèle Kavugho, la vingtaine, devenue veuve il y a deux ans. Elle raconte sont histoire au journaliste de l’agence Anadolu.

Elle a encore du mal à dire que son mari, Jules Kambale Kombi, est mort sous les balles d’éléments armés alors qu’il surveillait la piste des gorilles au sein du parc. Elle préfère dire qu’il « a troqué sa vie contre celle des Virunga ». La jeune femme était enceinte de six mois, lorsqu’elle a appris la nouvelle, « véritable coup de massue ».

 « Je rentrais du travail, quand, devant ma maison j’ai aperçu un attroupement. J’ai tout de suite su qu’il y était arrivé quelque chose. J’ai couru et deux femmes m’ont alors retenu », raconte-t-elle. « Devant la porte, Jules, gisait sur le sol, à demi couvert par un drap blanc taché par le sang…ça m’a brisé. L’homme de ma vie, le père de mon futur enfant…. C’était bien plus qu’un choc, c’était un véritable séisme pour moi », se remémore-t-elle, la gorge nouée.

Aujourd’hui, Gisèle qui a accouché d’un petit garçon, et bénéficie de l’aide du « Fonds Virunga pour les rangers décédés » tente de garder la tête haute. Elle veut croire en la neutralisation prochaine des groupes armés par l’armée congolaise afin que les habitants cessent de vivre dans la peur et que les veuves ne se comptent plus par centaines.

L’Est de la RDC est une région déchirée par plus de 20 ans de conflit armé impliquant l’armée loyaliste, des communautés ethniques, groupes armés nationaux et rebellions étrangères. Meurtres, kidnappings, braconnages, sont devenus monnaie courante.

Selon le Baromètre sécuritaire du Kivu, un projet conjoint mené par Human Rights Watch (HRW) et le Groupe d’étude sur le Congo (GEC) dépendant de l’université de New-York, la plupart des kidnappings et attaques sont perpétrés par des présumés rebelles rwandais des forces démocratiques pour la libération du Rwanda (FDLR), des éléments des groupes Mai-Mai Nyatura et plusieurs milices Maï-Maï.