Bénin – CRIET: 2 ex-cadres du centre universitaire maintenus en prison
La Cour de répression des infractions économiques et du terrorisme (CRIET) a mis un terme à la liberté provisoire, dont jouissent, depuis un an, Hypollite Ogoutéhibo et Abdel Aziz Osséni, tous deux, cadres du centre universitaire de Djougou, impliqués dans un dossier de détournement de deniers publics.
Dix (10) ans d’emprisonnement ferme et 5 000 000 FCFA d’amende? en plus de 3 948 500 FCFA de dommages-intérêts, tel est le verdict prononcé par le juge de la Cour de répression des infractions économiques et du terrorisme, lors du procès de la session criminelle du vendredi 19 Juin 2020, contre Hypollite Ogoutéhibo, alors chef service scolarité, et Abdel Aziz Osséni, chef service comptabilité, du centre universitaire.
Les deux cadres condamnés, bénéficiaient, depuis le 26 mars 2020, d’une liberté provisoire que cette décision vient d’abréger. Abdel Aziz Osséni a été condamné, pour détournement de denier public, faux et usage de faux en écriture publique, à 10 ans d’emprisonnement ferme. Quant à Hyppolite Ogoutéhibo, il a écopé de 7 ans d’emprisonnement
A la barre, Hyppolite Ogoutébi a reconnu les faits mis à sa charge, mais a précisé avoir remis une partie des sommes dues aux étudiants, courant 2014-2015, à travers un versement de 1,150 million de FCFA à la banque et 955 mille francs au trésor public; versements dont il a exhibé les quittances.
Pour les 2.445.000 FCFA restants, l’accusé affirme les avoir restitués aux étudiants contre décharge et qu’ils s’en sont servis pour régulariser leur situation au niveau de la comptabilité de l’université de Parakou. Mais le président de céans n’est pas très convaincu des décharges exhibées par l’accusé. A défaut de la présence des étudiants concernés pour témoigner, la Cour rejette ces documents comme une preuve de payement.
Abdel Aziz Osséni a reconnu, lui aussi, les faits qui lui sont reprochés, mais a contesté le montant mentionné par la Cour. Sur les 3.948.500 FCFA, il ne reconnait que 3.418.500 FCFA qu’il a, d’ailleurs, affirmé avoir remboursé aux victimes.
Dans ce dossier, l’Etat, représenté par l’agent judiciaire du trésor, s’est constitué partie civile et réclame, pour toutes causes de préjudices subis, la somme de 2.445.000 FCFA pour l’Etat béninois à Hyppolite Ogoutéhibo et 1.470.000 FCFA à Abdel Aziz Osséni.
La réquisition (ministère public)
Dans son réquisitoire, le ministère public, représenté par Edwige Aklou Tangni, 2e substitut du procureur spécial près la Cour de répression des infractions économiques et du terrorisme (Criet), a démontré que le crime de détournement de deniers publics est constitué sur tous les plans, à savoir légal, matériel et intentionnel à l’égard des deux accusés.
Elle requiert de retenir contre Abdel Aziz Osséni l’infraction de faux et usage de faux en écritures publiques. Le ministère public démontre, par ailleurs, une collusion criminelle assez poussée entre les deux accusés, laquelle collusion a permis aux étudiants concernés d’échapper à tout contrôle de l’administration de l’Université, qui ne peut pas savoir qu’il y a des étudiants qui sont frauduleusement inscrits et dont les frais de scolarité ont été utilisés à des fins personnelles par les deux inculpés.
Ainsi, au nom de la société béninoise qu’elle représente, Edwige Aklou Tangni requiert que la Cour condamne Hyppolite Ogoutéhibo et Abdel Aziz Osséni, respectivement, à sept ans et à dix ans de prison et à cinq millions FCFA d’amende, chacun. Elle invite la Cour à faire droit aux demandes de l’Etat béninois, représenté par l’Ajt, partie civile, et d’interdire les deux accusés de l’exercice de tout emploi public au Bénin.
Le plaidoirie (défense)
La défense des deux accusés, assurée par Me Aline Odjé, a qualifié de « terriblement excessif » le réquisitoire du ministère public. Elle implore la clémence de la Cour et l’invite à ne pas suivre les réquisitions du parquet spécial près la Criet. L’avocate au barreau béninois plaide que la Cour fasse ressortir, dans sa sanction, une mesure d’éducation.
Elle plaide également une condamnation assortie de sursis, tenant compte du temps déjà passé en détention préventive par ses deux clients. Mais dans son verdict, la Cour est allée dans le même sens que le ministère public avec un allègement de la peine prononcée contre Hyppolite Ogoutéhibo.
Les faits
Il est reproché aux accusés d’avoir détourné les frais de scolarité de certains étudiants de l’ex-Ecole nationale des sciences et techniques agricoles de Djougou (Ensta-Dj) de l’ex-Centre universitaire de Djougou, qui sont passés entre leurs mains. En effet, certains parents d’étudiants leur ont fait confiance et leur ont remis ou envoyé les frais de scolarité de leurs enfants. Ils devraient les reverser pour permettre à ces apprenants de valider leurs inscriptions et disposer de leur carte d’étudiant avec le numéro matricule. Ce qu’ils n’ont jamais fait. Ils ont détourné les fonds. Pire, ils ont usé de manœuvres frauduleuses pour faire croire à l’administration de l’Université de Parakou que les étudiants concernés étaient tous à jour vis-à-vis de la comptabilité et les faire échapper ainsi à toute sorte de contrôle opéré par le rectorat de l’Up.
Ainsi, les étudiants concernés ont régulièrement composé comme leurs autres camarades à jour. Ils ont obtenu régulièrement leurs notes pour passer chaque fois en classe supérieure, pendant les trois ans de leur cursus, de 2010 à 2013, au niveau de l’ex-Ensta Dj. Ils ont même soutenu leur mémoire. Le pot aux roses sera découvert; lors de la réclamation de l’attestation de Licence sanctionnant leurs trois années d’études.
Le rectorat de l’Up leur a opposé une fin de non-recevoir catégorique. Il a été répondu à ces étudiants qu’ils ne se trouvent pas dans la base de données de l’Up et n’ont pas de numéros matricules, preuve de leurs inscriptions. Précisons que jusqu’ici, ces étudiants n’ont pas obtenu leur parchemin pour poursuivre le diplôme de master. Les incessantes dénonciations et plaintes de ces étudiants ont amené le ministère de l’Enseignement supérieur et de la Recherche scientifique (Mesrs) à mettre sur pied, en février 2019, une commission pour voir clair dans la situation.
Les investigations ont abouti à l’interpellation des deux accusés, qui ont été placés, par la suite, sous mandat de dépôt, le 21 février 2019, pour détournement de deniers publics. Le rapport de la commission de contrôle a été même examiné en Conseil des ministres du 13 février dernier, lequel met à la charge d’Hyppolite Ogoutéhibo et Abdel Aziz Osséni, respectivement, les sommes de 4, 550 millions FCFA et 3 948 500 FCFA.
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