« Droit de grève et logique allemande », une chronique de Roger Gbégnonvi

​Pour avoir tracé et formaté le ‘‘couloir’’ aujourd’hui appelé le Bénin, la France semble son horizon indépassable. Il suffirait pourtant que les Béninois regardent par-dessus le mur pour voir la grande partenaire de la France, l’Allemagne, qui a des pratiques dont l’adoption pourrait aider au développement du Bénin. Par exemple, sa philosophie du droit de grève.

​L’article 33 de la Loi Fondamentale (das Grundgesetz), en son paragraphe 4, stipule : ‘‘ En règle générale, l’exercice de pouvoirs de puissance publique doit être confié à titre permanent à des membres de la fonction publique placés dans un rapport de service et de fidélité de droit public.’’ Sans être de toute clarté, cette traduction Internet dit l’essentiel : parmi les fonctionnaires de l’Etat, il y a les permanents, ceux qui ont avec l’Etat un contrat à vie et qui doivent à l’Etat service permanent et fidélité.

Ceux-là ne vont jamais en grève. Car si la femme enceinte, prise par quelque malaise, ne peut aller à sa clinique privée pour cause de grève, elle sait que les maternités de l’Etat lui sont ouvertes et qu’il y aura un praticien pour l’écouter et l’aider au nom de l’Etat qui assure, en permanence, la sécurité et la liberté des citoyens.

Si dans une école, les enseignants sans contrat à vie avec l’Etat entrent en grève, les permanents poursuivent leurs enseignements, car l’Etat a prévu qu’aucune école ne ferme jamais pour cause de grève et laisse désemparés les élèves et les écoliers. Un tel vide, un tel lâchage, reviendrait à mettre en péril la sécurité et la liberté des Allemands.

​En vérité, l’absolue fidélité des permanents impressionne les autres et déteint sur l’ensemble des fonctionnaires et des travailleurs. Un jeune enseignant à l’université se montre déjà ‘‘fidèle’’ parce qu’il aspire à être coopté par l’Etat comme son fonctionnaire permanent. Et l’on a mauvaise conscience de se mettre en grève, face à l’absolue fidélité des permanents.

Alors, on ne s’arrête pas, on négocie. Quand les syndicats ouvriers finissent par entrer en grève, c’est que le patronat, après des jours de discussion, refuse de céder sur un point jugé important. Alors setting sur les lieux du travail. Chiffres en main, on met la pression en poursuivant la discussion. Par notre travail, nous avons contribué à élever le PIB. On peut donc moderniser l’outil de travail tout en augmentant nos salaires.

L’idée que tous se font de la sécurité et de la liberté des Allemands hâte la signature de l’accord. A observer de loin les Allemands, le sentiment prévaut qu’ils vont au travail comme vers un idéal à accomplir. Le travail n’est pas une punition qu’ils subissent, et dont ils se reposeraient en provoquant des grèves intempestives. Il y a chez eux comme une mystique du travail.

​En vérité, c’est dès le paragraphe premier de l’article 2 que se dessine cette mystique : ‘‘Chacun a droit au libre épanouissement de sa personnalité pourvu qu’il ne viole pas les droits d’autrui ni n’enfreigne l’ordre constitutionnel ou la loi morale.’’ Or ‘‘la loi morale’’, c’est l’impératif catégorique de Kant : ‘‘Agis de telle sorte que la maxime de ta volonté puisse toujours valoir en même temps comme principe d’une législation universelle.’’

Or l’impératif catégorique de Kant, c’est la traduction dans la philosophie des Lumières de l’évangéliste Matthieu : ‘‘Tout ce que vous voulez que les hommes fassent pour vous, faites-le vous-mêmes pour eux : voilà la Loi et les Prophètes’’ (7/12). Vous ne supporteriez pas que votre conjoint meure parce que le corps soignant est en grève ? Alors…

​Il est prodigieux de retrouver le plus grand principe moral de l’humanité au rang des 142 articles de la Grundgesetz qui régit les Allemands depuis 1949. Le Bénin, fédération d’ethnies, comme l’Allemagne est fédération d’Etats, a-t-il sa ‘‘Règle d’Or’’ ? Vivement une forte logique béninoise qui permette aux Béninois de travailler sans arrêt à ‘‘faire quelque chose pour le bonheur’’ ! Leur bonheur personnel, et le bonheur de l’autre, leur concitoyen.

Roger GBEGNONVI

10 comments

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N’KOUEI Basile

Je ne sai pour quoi les intellectuels se comportes de la sorte au Bénin ! Ont dirait effectivement que le travail pour eux est une punition.

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James Loudo

Merci

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TOFFOUN Ange Joël Cyr

Dura Lex, Sed lex
« La loi est dure mais c’est la loi ».
Tant que tous les Béninois, hommes d’Etat, fonctionnaires, agents, particuliers ne vont pas au culte du travail, et du travail bien fait on ne pourra pas faire un petit pas dans le développement. C’est le travail qui est le trésor a dit la Fontaine. Implicitement, les députés nous envoient à cela.
Il n’y a pas de feu sans tisons. Il y a rien sans rien. Il y a donc saturation dans la pratique de droit de grève.
L’événement cache qu’il y a quelque part, une ivresse dans la pratique du droit arraché. Quel verre de grève prendre désormais? Un ou deux petits verres entiers ou carrément un verre bambou entier. Ou plusieurs verres bambous ou tomber dans la griserie ou la morve. C’est la cure d’abord. Une thérapie obligée. Après la cure on va boire avec esprit.
Je fredonne: « Retroussons les manches, plions les pantalons pour construire le pays. La main dans la main, nous marchons gaiement prêts pour la Révolution… »
Cependant, il ne faut pas désespérer, une révolution peut en cacher une autre. Les civilisations meurent et engendrent d’autres. Pourquoi pas une révolution?. Seule la loi de Dieu est éternelle.
Ange Joël Cyr TOFFOUN

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Elijah

On n’aurait pas pu dire mieux!

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Philippe CHABI

Je travaille, donc je suis ! Le travail est nécessaire, voire indispensable : en aucun cas, il ne pourrait être objet ni sujet de chantage individuel ou collectif !

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MARIUSBEN

Pour une fois j’adhère complètement à cet article. Au Bénin, on a l’impression que le syndicalistes et leurs dirigeants veulent s’imposer comme un pouvoir issu des urnes. Pour un oui ou un non on se met en grève, il faut montrer sa puissance face au pouvoir politique. Le syndicalisme se comporte comme un parti d’opposition qui veut à tout prix s’opposer au pouvoir politique. Le syndicalisme au Bénin oublie que le rôle essentiel des syndicats, c’est de défendre par la négociation les intérêts de travailleurs. C’est quand la négociation a échoué que le recours à la grève devient ultime. Ici, au Bénin, le mot d’ordre c’est la grève; mais ceux-là mêmes qui décident de la grève oublient qu’ils sont les privilégiés de la Nation. Combien gagne la grande majorité des paysans? Combien gagne un magistrat, un médecin? Ne sont-ils pas déjà des privilégiés? Ne doivent-ils pas se mettre au travail pour permettre un accroissement frappante de la production afin qu’il y ait une répartition de revenu vers les plus faibles, les plus indigents? Un paysan malade qui ne trouve de médecin pour le soigner, comment peut-il produire? Au Bénin, il faut réfléchir sur l’usage intempestif de la grève. Un pays ne pourra jamais se développer si pour oui ou non on bloque l’activité économique d’une manière ou d’une autre.

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Marc N Assogba

La philosophie de travail bien fait et la liberté de droit de gève sont liées. Le travail étant un droit, l’État a le devoir de former professionnellement les citoyens et les utiliser pour développer le Bénin. Mais des conditions d’équipement, de salaires et de sécurité adéquates sont indispensables. Au Bénin les autorités politiques s’octroient des salaires et autres primes au délà des capacités du budget d’un État sous développé. Par contre les travailleurs dont les émoluments les protègent à peine contre les besoins essentiels, doivent lutter pour que les équipements (tables techniques de chirurgie, laboratoires, amphis, produits) leurs soient fournis. En Allemagne ces conditions sont remplies et les travailleurs sont à l’abri des besoins éssentiels. Le professeur Gbégnonvi sait bien que la comparaison des cas du Bénin et de la première puissance économique européenne n’est pas indiquée. Tout rétrait manu militari de droit de grève réduirait, les travailleurs à une situation d’esclavage. Ce qui nuirait à notre démocratie.

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Azatassou

J’espère que le pouvoir ne cédera pas!!!!!!!!!!

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Baghana sero

Soyons objectif,ne voyons pas seulement leave mauvais coté de LA greve

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Sossou

Les copieurs colleurs. Pruuuuuhhhhh. Ne comparez pas la France, l’Allemagne et le Bénin. Le général Kekereke avait raison : les intellectuels tarés. Même gbe gnon viii.