« Pourquoi le Bénin ne peut pas s’endetter comme la France »
En matière d’économie de la dette, il y a une notion essentielle qui fait que tout le monde ne peut pas s’endetter de la même manière et au même rythme : c’est la notion de soutenabilité.
Le Bénin n’a pas en effet la même force de travail, la même surface d’échanges, les mêmes réserves stratégiques, et n’abrite pas des fonds d’investissements comme ces pays riches pour se permettre de s’endetter à leur rythme.
En d’autres termes, le pauvre ne peut pas s’endetter au même rythme que le riche. On dira de façon triviale que celui qui est sous un toît de paille ne peut pas s’attirer la pluie avec la même ampleur et le même rythme que celui qui se trouve sous une dalle de ciment. Autrement, il prendrait l’eau.
Ce n’est donc pas parce que la France et les États-Unis sont à plus de 100% de dette par rapport à leur PIB que le Bénin peut aussi se le permettre.
Une autre notion tout aussi essentielle qui décourage le mimétisme en matière de dette publique est la notion de perception du risque. Cette perception diverge nettement selon qu’on est en face d’un pays riche ou d’un pays pauvre.
Si on est en face d’un pays pauvre le risque est grandement, voire exagérément perçu, alors que si on est en face d’un pays riche le risque perçu est si petit qu’il est même invisible.
Résultat de cette perception : les pays pauvres empruntent avec un taux d’intérêt très élevés alors que les pays riches empruntent avec un taux d’intérêt moins élevé et généralement sans taux d’intérêt.
Ainsi, aujourd’hui si le Bénin et la France se présentent sur le marché de la dette pour emprunter 100f, le Bénin va rembourser 106 f alors que la France ne remboursera que les 100 f, voire même 99 f puisqu’il arrive que certains prêteurs voient en la France un pays refuge pour leurs capitaux et estiment que prêter de l’argent à la France c’est mettre son argent dans un coffre-fort dont ils payent le prix du loyer.
Ainsi le Bénin a à perdre s’il suit le rythme d’endettement de la France puisque l’endettement de la France ne pèse pas de la même façon sur ses finances que celui du Bénin peut peser sur les siennes.
Autrement, le Bénin depuis le début de cette année a déjà emprunté rien que sur le marché de l’UEMOA plus de 500 milliards. Ces 500 milliards lui coûtent 30 milliards d’intérêts ( l’UEMOA fait 6 à 7% d’intérêt en général ) alors que dans le même temps ces 500 milliards ne coûteraient rien à la France sinon qu’elle paierait dans certains cas moins que les 500 milliards.
S’endetter coûte cher pour le Bénin dont les ressources qui pourraient servir à construire un hôpital sont affectées au service de la dette pour n’en payer rien que ses intérêts. Alors que la France n’affecterait rien au titre de paiement d’intérêt.
Constant Sinzogan
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