L’Etat central a institué un examen de fin de formation pour les apprentis du secteur de l’artisanat. Ceci, pour stopper la libération traditionnelle, qui soumettait les apprentis au diktat des patrons. Mais, aujourd’hui, des associations rendent la vie dure aux candidats, après cet examen.
Le 8 juin 2020, les appentis coiffeurs et coiffeuses du département de l’Ouémé étaient dans leur salle d’examen pour les épreuves pratiques, devant sanctionner leur formation et leur permettre d’obtenir le sésame. Dans d’autres départements, le même examen a été organisé au profit des apprentis des différents corps de métiers de l’artisanat (Couture, coiffure, peinture, vitrerie, maçonnerie, et bien d’autres).
Si cet examen, institué par décret N’20I0-641 du 3I octobre 2O1O portant Certification des Qualifications Professionnelles par Apprentissage, revêt tout son sens, compte tenu de la nouvelle orientation qu’a donnée l’Etat central à ces formations diplômantes et loin des couacs organisationnels souvent soulevés par des acteurs avisés du domaine, il y a « la politique de destruction financière des organisations du secteur ». « Notre association nous exige trop de frais qui sont parfois, à la limite, de faux frais, donc de l’arnaque », s’est indignée Catherine, apprentie coiffeuse en fin de formation et ayant participé à l’examen 2020 du Certificat de qualification des métiers (CQM).
A 24 ans, Catherine, mère d’une fille, très tôt, a payé ses frais de formation de trois (3) ans à sa patronne coiffeuse, résidant dans la commune de Sèmè-Podji. « Mes parents ont payé deux cents vingt mille (220 000) francs Cfa comme l’a demandé ma patronne », a signifié Catherine. Pour elle, ces frais sont en TTC et devraient également lui permettre de participer à l’examen pour le CQM. Mais si ma patronne ne réclame encore rien, poursuit-elle, « les associations des coiffeurs et coiffeuses de Sèmè-Podji, en dehors des autres frais de recyclage, d’examen blanc et de participation collective pour une réjouissance, m’exige le paiement de trente mille (30 000) francs avant obtention de mon diplôme ». Un frais que les responsables d’organisation ont du mal à lui justifier.
Pour Guy Goussanou, responsable communal du Groupement des associations des professionnels de la coiffure de la commune de Sèmè-Podji, « l’association n’est pas exigeante et une organisation post-examen est souvent l’œuvre des patrons de salon de coiffure pour remercier leurs apprenants, après des années de formation dans leurs salons ». Même déclaration au niveau de l’Association des coiffeurs et coiffeuses d’Akpakpa, Cotonou, une autre association indexée.
« L’enfant a souffert pendant toute sa période de formation. Sur son certificat de qualification, nulle part, le nom du patron n’est inscrit sur ce document. L’alternative trouvée, c’est que le centre délivre un diplôme qui comporte les renseignements nécessaires des formateurs, qui atteste au moins que l’apprenant vient de tel lieu. De commun accord avec les parents des apprenants, on organise la cérémonie de sortie des apprenants admis. Et cette cérémonie est à titre payant », a clarifié Mathieu Gnonfidé, responsable du centre de formation professionnelle pour les métiers d’avenir. En dehors de cela, souligne-t-il, aucune association ne devrait encore réclamer des frais.
Au niveau de l’ONG Engagement pour le mieux-être social (Emes), une organisation qui travaille avec plus de 46 associations des professionnelles des métiers d’artisanat, le combat se mène pour sensibiliser et conscientiser les différents acteurs, afin de bannir les pratiques peu honorables qui gangrènent malheureusement ces différentes corporations.
Pour les responsables du syndicat national des professionnels de la coiffure et de l’esthétique du Bénin (Synaproceb), les associations sont, certes, autonomes, mais la faîtière veille toujours au respect des dispositions statutaires et surtout la promotion de la bonne gestion et l’éradication de toute pratique douteuse dans la corporation.
Quid des associations indexées ?
La corporation de la coiffure regroupe plusieurs associations, tant sur le plan national que sur le communal et local. Dans la commune de Sèmè-Podji, par exemple, on dénombre plus de 9 associations de ces professionnels de la coiffure et de l’esthétique. Dans la commune de Cotonou, plus d’une vingtaine d’associations sont opérationnelles. « Mais il y en a qui opèrent dans la clandestinité, à la limite, s’adonnant à de l’arnaque, puisque ne figurant pas dans le grand ensemble formé à cet effet », dévoile Guy Goussanou, responsable communal du Groupement des professionnels de la coiffure de Sèmè-Podji, membre du Synaproceb.
Même si le nettoyage est nécessaire pour limiter ou éviter ces pratiques, des patrons et responsables de salons de coiffure élaborent parfois des stratégies propres à eux, afin de « percevoir, même après la réussite à l’examen du CQM, des frais pour des fins parfois douteuses ». « Ces patrons pourraient, pour salir les associations, évoquer ces dernières auprès des parents », nous a confié l’organisateur principal de l’Association des coiffeurs et coiffeuses d’Akpakpa, niant ainsi l’implication de son association dans cette manœuvre.
Tout en invitant les responsables du Synaproceb à « discipliner leurs membres », des parents de ces apprentis menacent de porter l’affaire au plus haut, afin de décourager ces pratiques déjà rangées par le décret instituant le CQM. « Toutefois, nous invitons les autorités étatiques à s’y pencher de près, pour que le milieu soit véritablement assaini », a vivement souhaité Joachim, parent d’un des « apprentis victime ».
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