Chronique de Roger Gbégnonvi : « Djeffa fut un mauvais cinéma, un spectacle indigne »
Ils se sont réunis à Djeffa le samedi 14 avril 2018. Ils ont rédigé un long texte appelé Déclaration et qui, d’entrée de jeu, sonne la charge : « Notre pays, le Bénin, va mal ! ».
Que dire à l’adresse du président Soglo, le plus en vue des quatre leaders en blanc à Djeffa ? Lui rappeler que, peu après avoir quitté le pouvoir, il fut reçu avec les honneurs présidentiels à la Marina et que, au cours d’un tête-à-tête pathétique, son hôte lui avait déclaré que l’on avait été mécontents quand il avait traité les intellectuels béninois de tarés, mais qu’il se devait de lui révéler que, parmi ses collaborateurs les plus zélés du moment, il y en avait deux qui étaient des pervertis (sic).
Et il les avait nommés. Fort de cette confidence, qui le plaçait au-dessus de tout soupçon, lui, Soglo, doit s’éloigner de certaines gens et aurait dû s’éloigner de la Déclaration de Djeffa et de ses affirmations sans analyse. En voici deux ou trois. – « Toutes [les] ressources [du pays] au profit exclusif du Chef de l’Etat et de son clan ». Imaginent la rue et les gouttières. Sornette. Certes, le Chef de l’Etat l’a juré : « Je vais faire maigrir les dépenses de l’Etat ». Et vous voilà sevrés. Mais allez-vous le pendre parce qu’il se rend en voiture à un sommet de l’UEMOA ? – « Tout le peuple est en rébellion contre la politique actuelle ». Pas vrai !
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Le député vendeur de faux médicaments, l’ancien maire de Cotonou soupçonné de tricheries, les vendeurs de drogue, les instituteurs voleurs du riz des écoliers, les cybercriminels assassins, etc., ceux-là veulent le désordre. Epouvantable ! -De « hautes personnalités comptables des décisions de l’historique Conférence Nationales des Forces Vives ». Mais non. Le PCB, présent à Djeffa, pourfend lesdites décisions. – « Que le Dieu de Béhanzin… bénisse notre pays ».
Oh non, pas le Dieu du roi qui a vendu ses sujets avant et après l’abolition de l’esclavage ! Etc., etc. Soglo a-t-il vraiment adoubé la Déclaration de Djeffa, farcie de démagogie et teintée de haine ? Ce texte ne reflète pas l’authentique Soglo. Rien à dire à l’adresse du Président Boni Yayi, car il pleura.
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Prévoyant la ruine de Jérusalem, Jésus pleura sur Jérusalem. Voyant la ruine dans laquelle il a précipité le Bénin, Boni Yayi pleura à Djeffa. Au souvenir de la CEN-SAD, d’ICC-Services, de Mariagléta, des milliards volés du siège du Parlement, des milliards volés des Pays-Bas, de Dangnivo disparu corps et voiture, etc., etc., à ces souvenirs et à d’autres, Boni Yayi pleura. Grand bien lui fasse, si ce ne sont pas des larmes de caïman, car Boni Yayi sait mener son monde en bateau.
Presque rien à dire à l’adresse de Sébastien Adjavon, président d’honneur de l’USL. Grâce à un contrôle fiscal, il a refréné son ardeur à nous infliger les poulets réformés de France destinés à la destruction. Nous l’en remercions. Il veut, dit-on, accrocher son nom à un terroir, pour faire écho à « Renard de Djrêgbé ». S’il alimente un peu plus ses bien-aimés journalistes, ils le baptiseront « Crésus de Djeffa ». Mieux sonnant que « Renard de Djrêgbé ».
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Venons-en justement à l’animal politique, Médiateur émérite de la République, Frère Melchior chez les catholiques. La Déclaration de Djeffa, balancée sur Patrice Talon le 14 avril 2018, charrie la même haine que la Déclaration de Cotonou, balancée sur Nicéphore Soglo le 03 juillet 1993, au Sheraton Hôtel, et signée Albert Tévoédjrê. Le général de Gaulle nous livre la morale de cette histoire qui bégaie : « La vieillesse est un naufrage ». Le vieillard, ici, s’est noyé dans l’égout des rancœurs. Or donc, après plus d’un demi-siècle de chauffe, Melchior doit quitter l’agitation sempiternelle, s’arrêter enfin.
Et, avant d’entonner le nunc dimittis, savourer ce que dit l’un de ses auteurs préférés, Alfred de Vigny : « A voir ce que l’on fut sur terre et ce qu’on laisse, / Seul le silence est grand ; tout le reste est faiblesse ». Au total, Djeffa fut un mauvais cinéma, un spectacle indigne. Quand on n’a plus rien à dire, on se tait. Quand on n’a plus rien à montrer, on se retire. On respecte les Béninois.
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