Tchad: les langues se délient (enfin) sur la vraie cause de la mort d’Idriss Déby Itno
De nombreux africains, et surtout Tchadiens, s’interrogent encore sur les circonstances exactes de la mort du président Idriss Déby Itno. Selon plusieurs sources proches de l’armée, la version officielle selon laquelle le Maréchal est mort sur la ligne de front séparant son armée des rebelles dans le nord du pays est un pur montage et affabulation.
Dans la soirée du 19 avril 2021, le bruit court à N’Djaména, que le président Déby a été blessé lors de combats contre le front pour l’alternance et la concorde au Tchad (Fact), un groupe d’opposants lourdement armés, basé dans le Sud libyen et composé majoritairement de membres issus de la communauté Gorane.
Les rebelles du Fact ont déclenché une offensive de déstabilisation du pouvoir central depuis le 11 avril, le jour de l’élection présidentielle. Mardi 20 avril, l’armée tchadienne annonce la mort sur la ligne de front du président tchadien Idriss Déby, au pouvoir pendant plus de trente ans. Une pure affabulation !
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Le président Idriss Déby, effectivement au front
Si la version officielle servie par l’actuelle Conseil Militaire de Transition n’a convaincu que les plus naïfs, les langues se délient de plus en plus sur ce qui s’est réellement passé ce samedi 17 avril 2021. En réalité, le Maréchal-président n’est pas mort ce mardi 20 avril 2021. Mais, deux jours plus tôt.
En effet, dans le week-end du 17 avril 2021, le président Idriss Déby s’était rendu dans la zone de Nokou, dans la province du Kanem, à environ 250 kilomètres de la capitale Ndjamena. L’armée et les rebelles du Front pour l’alternance et la concorde au Tchad (Fact) se faisaient face dans la zone. Le Maréchal-président s’y était rendu pour encourager la troupe qui avait des difficultés à prendre le dessus sur les rebelles du Fact dans cette zone.
Accompagné de son aide de camp Khoudar Mahamat Acyl, frère de la première dame, le Président Idriss Deby s’installe à son Quartier Général, situé à une cinquantaine de kilomètres du front, où se déplacent des pick-ups rebelles lourdement armés, suivis par des aéronefs français qui communiquent leurs positions à l’état-major de Déby. Grâce à leurs moyens techniques, les Forces spéciales françaises transmettent les renseignements des capteurs français aux officiers tchadiens. Une aide indispensable pour la troupe de Déby qui, malgré cela, perdait presque la bataille. D’où l’arrivée du « Maréchal ».
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La dépouille de la mère de Yaya Dillo, objet d’un conflit familial
Idriss Déby convie plusieurs responsables militaires à une réunion sous sa tente dans le QG. À la fin, serait arrivé un général, cousin de l’opposant Yaya Dillo. L’opposant et candidat déclaré à la présidentielle tchadienne du 11 avril, était en fuite depuis la tentative d’arrestation, dont il a fait l’objet les 27 et 28 février à son domicile de N’Djamena.
Les éléments de la garde présidentielle sont rentrés dans la maison, et ont tout cassé. Ils voulaient prendre Yaya Dillo, mais l’homme avait été exfiltré lundi 1er mars de son domicile, par d’autres membres de l’armée. Les éléments de la garde présidentielle ont quand même tué sa mère de 90 ans, et un de ses fils.
Il faut rappeler que l’opposant Yaya Dillo, ancien Premier ministre du président Idriss Déby, qui vient de perdre sa maman a des demi-frères qui sont dans la garde présidentielle. De plus, la mort de la mère de Yaya Dillo, qui était également une tante du président Idriss Déby, a fait une grande colère au sein de leur tribu Zaghawa.
Ce général, qui est un cousin de l’opposant Yaya Dillo, donc par ricochet un parent de la mère-défunte de l’opposant, entre ainsi dans la tente de Déby. Il arrive d’un poste avancé qui protège le QG du maréchal. « Eh rebelle, qu’est-ce que tu fais ici ? », lui aurait lancé Idriss Déby, pour qui le mot « rebelle » ne désigne pas l’ennemi venu de Libye. Il traduit le ressentiment qu’il a envers ce général, qui avait refusé de s’associer à l’attaque du domicile de l’opposant Yaya Dillo. « Vous devriez nous rendre le corps de notre tante [ la mère-défunte de l’opposant Yaya Dillo, ndlr] que vous avez sauvagement assassinée et dont vous confisquez le corps jusqu’à présent… » Une parole de trop qui aurait mis le maréchal hors de lui.
Idriss Déby aurait sorti son pistolet et abattu à bout portant l’officier. Dans la foulée, une rafale retentit. C’est le cousin du général abattu, le sous-lieutenant Umaru Dillo Djérou, qui aurait tiré sur le Président Déby. Suit une fusillade qui cause la mort de plusieurs militaires et en blesse d’autres, dont le général Taher Erda, le patron du renseignement, légèrement touché.
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Emmanuel Macron informé sur-le-champ
Grâce à ses officiers de liaison, Paris est informé sur-le-champ de la mort du Président tchadien. Son fils, le général Mahamat « Kaka », qui se trouvait à l’extérieur, sur le champ de bataille, est joint en premier par les autorités françaises. Il aurait parlé avec Emmanuel Macron.
Le chef d’état-major général des armées, le général Abdelkerim Daoud, est appelé à son tour. Il est alors convenu que le général Mahamat Idriss Déby à la tête du pays est la solution pour une transition, sans que les mystères qui entourent la mort de son père ne soient révélés.
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