Algérie: Bouteflika, l’héros devenu la risée de tous ses compatriotes
Le peuple algérien a fait vaciller le régime de Bouteflika avec des manifestations pacifiques entamées depuis le vendredi 22 avril 2019, sifflant ainsi la fin de 20 ans d’ « autocratie » marqués par des secrets et des mystères et certainement inconnus de la jeune génération. Mais, au delà de tout, le peuple algérien doit un petit « merci » à Bouteflika qui a réussi par sa politique de « Concorde civile » à mettre fin à la guerre civile et à semer la paix en Algérie.
Tout a commencé en 1999, l’année où Bouteflika a accédé au pouvoir exécutif en Algérie : un pays en pleine crise sociale voire politique. Une fois au pouvoir, le natif de Oujda, une ville au nord-est du Maroc, à proximité de la frontière algérienne, a comblé les premières attentes de la population. C’est alors que la décennie noire (années du terrorisme) a commencé par prendre fin après avoir avalé des milliers de victimes et semé des traumatismes profonds.
Mais, les années de terrorisme ne sont pas enseignées à l’école. Jusqu’à aujourd’hui, cette décennie reste enveloppée de secrets et de mystères pour nombre de jeunes algériens. La majorité des Algériens ne savent pas comment la crise est née et comment elle a pris fin. La version nationale stipule que Bouteflika a réussi par sa politique de « Concorde civile » à mettre fin à cette guerre et à semer la paix en Algérie. Bouteflika devient ainsi le leader de la paix.
Bouteflika l’être aimé du peuple
Pour son premier mandat, Bouteflika a su vendre son image. Il a scellé des liens forts avec le peuple algérien qui voyait en lui le « messie ». Et il l’était bien plus qu’au-delà : une icône, un martyr etc…Président et leader de la paix c’est du moins ce qui transparaissait sur les effigies bordant les rues et ruelles de l’Algérie en 1999 l’époque où, plusieurs couples donnent son prénom à leur nouveau-né : Abdelaziz. Bouteflika était l’Algérie toute entière et incarnait le peuple algérien. Quoi de plus pour être un héros ?
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Bouteflika, l’être sacré aux mains souillées
Le père de la révolution, de la paix, n’a pas tardé à devenir l’être fort et sacré de la nation. Ce caractère sacré s’est également fait observé dans l’univers des médias à l’époque où, le journaliste ou le responsable qui oublie un fragment de son nom sacré « Sa Majesté le Président de la République monsieur Abdelaziz Bouteflika » était punissable.
Obsédé par le pouvoir, Bouteflika entame dès son deuxième mandat des manœuvres politiques et institutionnelles qui concourent à la violation récurrentes de la Constitution. L’opposition est interdite. Les citoyens qui sortent du silence sont intimidés, interpellés, matraqués, emprisonnés, menacés… Les exemples foisonnent.
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En 2004, le journaliste-écrivain Mohammed Benchicou, principal opposant de Bouteflika, est emprisonné, son journal Le Matin est fermé, à cause de ses articles et ses livres sur Sa Majesté. En 2009, le roman « Poutakhine, journal presque intime d’un naufragé » est interdit sans être lu parce que, selon les échos, le livre (une fiction publiée sous pseudo) est une critique acerbe contre Bouteflika et son système. En 2016, le journaliste Mohamed Tamalt est en prison à cause de ses publications sur Facebook, prises pour offense au président. Après une grève de faim, Tamalt meurt dans l’indifférence. Il ne faut pas toucher au sacré Bouteflika !
La fin de l’héros
Sa descente aux enfers a été précipitée par son désir de briguer un cinquième mandat malgré son état de santé qui l’oblige à passer ses jours dans un fauteuil roulant et de faire des sorties très rarissimes. Pour le peuple algérien, c’était de trop! Oui inacceptable et tout simplement inconstitutionnel. L’heure avait donc sonné pour siffler à jamais la fin de l’autocratie qui a longtemps duré. C’est ainsi que les manifestations ont été lancées avec une certaines profondeurs le vendredi 22 février 2019. Un jour devenu la date mémorable de la nouvelle révolution pacifique algérienne qui a conduit après plus d’un mois à la démission le 2 avril du vétéran algérien âgé de 82 ans. Abdelaziz Bouteflika est devenu objet d’humour sarcastique, d’ironie et d’insultes. Une fin triste qui donne raison à cette célèbre pensée: « l’abus du pouvoir rend momentanément fort et éternellement faible »
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