Opinion : Cet argent qui va circuler maintenant

Depuis des mois, autour de vous, la rengaine du manque d’argent s’est subitement renforcée, amplifiée. A la question de savoir si les salariés ne perçoivent plus leur salaire mensuel, on vous répond, agacé, que ‘‘ce n’est pas ça. S’il te plaît, comprends que l’argent ne circule pas’’. Intrigué, vous interrogez à la ronde. Et des langues se délient, hésitantes et sombres, mais se délient. Et vous comprenez à demi-mot, à mot couvert, à mot ouvert.

Non pas que l’argent ne circule pas, mais circule toujours. Néanmoins, ça ne marche plus au port. Avant, des gens habiles délestaient les conteneurs d’un tas de marchandises. La chaîne des entremetteurs s’arrêtait au marché Dantokpa, et vous aviez un bon pactole en plus du maigre salaire. Mais ils viennent de mettre des verrous d’enfer, de quoi décourager même les téméraires. Avant, des fonctionnaires touchaient deux à trois salaires, clando, à cause des collègues morts et réintroduits dans le circuit salarial par des portes dérobées. En plus, certains retraités émargeaient au trésor public sans avoir jamais été fonctionnaires de l’Etat. Tout ça complétait les faibles revenus. Mais avec le dernier recensement, confié à des inconnus inamicaux, c’est le glas des combines salvatrices. On s’offrait des heures de nuit, payées au taux le plus fort. Ils ont bousculé ça aussi.

Ensuite, depuis l’histoire du conteneur drogué, nos bons narcotrafiquants rasent les murs. Ces gens nous donnaient le fric en vrac. Pourquoi les traquer ? Et nos vieux syndicalistes, défenseurs éternels des pauvres travailleurs, obligés maintenant de passer la main, parce qu’on leur aurait soufflé que, désormais, le chantage ne serait plus payant. D’accord. Mais de quoi vivront-ils dans l’aisance comme avant ? C’est méchant.

Et les trous creusés par l’arrêt brusque des marches de soutien et de remerciement, la fin des messes d’action de grâces, etc. Tous ces robinets soudain asséchés, stérilisés, arrachés. Pourquoi ? Tu vois, l’argent ne circule pas. Notre pouvoir d’achat est à plat. Nos maîtresses menacent parce que nos bras ne sont plus chargés quand nous allons vers elles. Et nos enfants issus d’elles, que l’Etat ne comptabilise pas à cause de votre fichu Code de la Famille et des Personnes. C’était très bien, avec le Coutumier du Dahomey. Tu vas voir, la misère envahira le Bénin, car les sauveurs de la veuve et de l’orphelin s’adossaient à ces filouteries et faisaient ensuite l’aumône pour amadouer Dieu.

A quoi ça sert, hein, de tarir les sources de la charité ? Parle un peu, toi aussi ! Réponds ! Halluciné, ou simplement troublé, vous en oubliez l’injonction et embarquez pour l’avenir, l’espoir. Espoir que, fort de la déroute des filouteries pourvoyeuses d’amour, et riche de ce qu’on ne lui dérobe plus, l’Etat fera circuler désormais l’argent non volé pour porter l’eau potable et l’électricité dans les zones rurales, emplir de tables-bancs les écoles primaires publiques, rendre les hôpitaux á leur vocation de lieux où l’on rencontre la santé et non pas la mort programmée, donner aux personnes âgées l’accès aux soins idoines, pour qu’elles ne croient plus que la cécité, consécutive à la cataracte, et les misères dentaires, sont des fatalités de leur longévité, réaliser la prouesse budgétaire qui amènera les mamans à ne plus considérer la mort de leurs bébés comme volonté de Dieu, payer les fonctionnaires un peu mieux pour les soustraire à la tentation d’arnaquer le contribuable à l’occasion de tout papier officiel et à tous les coins du trafic routier, etc., etc. Que de miracles à opérer !

Et il n’y a point de fatalité sociologique, sociale ou sociétale. Sur ces claviers, Dieu lui-même joue la musique écrite par l’homme. Et cet argent sauvé, qui va circuler maintenant, peut nous permettre de dire avec Aimé Césaire : ‘‘…et nous savons maintenant que le soleil tourne autour de notre terre éclairant la parcelle qu’a fixée notre volonté seule et que toute étoile chute de ciel en terre à notre commandement sans limite.’’ Tous donc dans la cordée !

Roger Gbégnonvi

3 comments

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Israël

Gbegnonvi devrait avoir honte d’écrire à nouveau. Après avoir participé à la vaste campagne télécommandée contre Yayi s’il a encore un peu de scrupule il devrait présenter des excuses au peuple béninois au vu de la mal gouvernance et des détournements officiels qui caractérisent le régime qu’il a contribué ardemment à faire venir. Je croyais qu’il était un intellectuel il s’est révélé corrupteur de piètre facture

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Trst

Plutôt c’est toi le tarée il n’a fait que dit la vérité l’argent sale ne circule plu c’est tout et si vous êtes pas d’accord alors chassé talon du pourvoir avant la fin de son mandant et on verra la suite

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Mouminou SALIFOU

C’est bon tout ce que tu dis mon frère ! Mais nous devons poser la question suivante: Où passe tout cet argent sauvé des ces sources de gaspillage des deniers public ?